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Vol aux obsèques de Koffoé : Me Pépé Lama interpelle la conscience judiciaire après une peine de 10 ans contre l’auteur 

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Le tribunal de première instance de Kindia a prononcé une peine de 10 ans de prison ferme à l’encontre de Mohamed 1 Camara, reconnu coupable du vol de plusieurs téléphones portables appartenant aux enfants de l’humoriste Moussa Koffoé, lors de ses obsèques. Une décision qui, bien que conforme au droit, divise profondément l’opinion publique.

Sur les réseaux sociaux, deux camps s’opposent : ceux qui saluent l’exemplarité de la sanction, et ceux qui estiment que le verdict est excessif, surtout au regard du profil du prévenu, un jeune sans antécédent judiciaire.

Face à cette polémique, Me Pépé Antoine Lama, avocat au barreau de Guinée, a pris la parole sur son compte Facebook pour apporter une lecture juridique et morale de la décision.

« La décision de condamnation prononcée hier par le Tribunal de Kindia à l’encontre du jeune prévenu poursuivi pour vol aggravé est, juridiquement, conforme aux dispositions de l’article 374 du Code pénal guinéen.

Cet article prévoit une peine d’emprisonnement de trois (3) à dix (10) ans, assortie d’une amende de 1.000.000 à 5.000.000 GNF, ou de l’une seulement de ces deux peines.

En l’espèce, le Juge a fait le choix d’appliquer la peine maximale, sans accorder la moindre circonstance atténuante. »

Mais selon l’avocat, l’analyse ne saurait s’arrêter à la stricte légalité. Il appelle à intégrer les dimensions humaines, sociales et morales de l’affaire.

« Cependant, les faits ne sauraient être examinés uniquement à l’aune de la légalité stricte, sans prendre en compte les réalités humaines et sociales qui les entourent. Certes, le comportement du prévenu, qui s’est éhontément approprié les biens de pauvres orphelins, récemment endeuillés par la perte tragique de leur père, est moralement condamnable. Un tel acte, perpétré dans un contexte de deuil, trahit une profonde défaillance morale et mérite d’être fermement réprimé. »

Toutefois, Me Lama questionne le bien-fondé d’une telle rigueur pénale, surtout envers un primo-délinquant.

« Mais faut-il, pour autant, anéantir l’avenir d’un jeune primo-délinquant en l’écrasant sous le poids de la peine maximale prévue par la loi ?Faut-il ignorer les principes fondamentaux de justice restaurative, d’amendement du délinquant et de proportionnalité de la peine ? »

L’avocat met en lumière une incohérence flagrante dans la politique pénale guinéenne, en comparant cette affaire à d’autres jugements récents.

« À l’heure où la société guinéenne s’interroge sur la cohérence de sa politique pénale, force est de constater qu’une peine de dix ans d’emprisonnement pour le vol de biens matériels, même aggravé, jure cruellement avec d’autres décisions de justice récentes. Nombreux sont, en effet, les cas de viols ou de détournements de plusieurs millions de dollars, pour lesquels les auteurs ont écopé de deux à quatre ans de prison, suscitant incompréhension et frustration dans l’opinion publique. »

Pour cette raison, Me Lama propose une voie de recours, tout en réaffirmant que son intention n’est pas de déresponsabiliser le prévenu.

« C’est pourquoi, au nom de la tolérance religieuse, de la qualité de primo-délinquant du prévenu, et du besoin impératif de cohérence dans l’application des peines, il apparaît nécessaire que le ministère public exerce un appel dans l’intérêt de la loi et de la société tout entière.

Cette démarche ne viserait pas à absoudre le prévenu, ni à minimiser la gravité de son acte, mais plutôt à rétablir un équilibre juste entre la sanction, la réinsertion, et les exigences d’une justice équitable, humaine et cohérente. Elle traduirait aussi la volonté de la République de ne pas condamner plus lourdement le faible que le puissant, de ne pas punir plus sévèrement la pauvreté que la prédation économique, et surtout, de restaurer la confiance des citoyens dans l’institution judiciaire. »

Un débat plus large s’ouvre

L’affaire Camara ne se limite plus à un simple dossier de vol. Elle s’est transformée en catalyseur d’un débat plus large sur la proportionnalité des peines, la cohérence des décisions de justice, et la capacité du système judiciaire à concilier droit et humanité.

 

Laguinee.info

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