Ce vendredi 1er novembre 2024, l’armée guinéenne marque ses 66 ans. Mais pour Sékou Koundouno, activiste et membre du Front national pour la Défense de la Constitution (FNDC), ce n’est pas l’heure de la fête. Dans un message incisif publié sur son compte Facebook, il dresse un tableau sombre de l’institution militaire, dénonçant une armée qu’il accuse de répression, de politisation et de corruption.
Une armée au service de la répression
« Ce vendredi 1er novembre 2024 marque l’an 66 de l’armée guinéenne. Une commémoration qui a malheureusement lieu dans un contexte marqué par la politisation, l’ethnicisation et l’instrumentalisation à outrance de l’armée », écrit Koundouno. Il rappelle que l’armée, censée protéger le peuple, a souvent été utilisée pour réprimer les contestations populaires dans le sang. « Une armée qui a toujours été instrumentalisée pour réprimer dans le sang toutes les contestations et revendications légitimes du peuple de Guinée ne saurait être un modèle conformément aux principes directeurs d’une armée républicaine. »
Pour Koundouno, la mémoire collective garde des séquelles profondes des violences passées : « À titre d’exemple, le bilan humain et matériel des revendications sociales et politiques de 2007, 2009, 2013 à 2015, 2018, 2019 à nos jours, particulièrement meurtrier, est loin d’honorer l’armée guinéenne. On dénombre en effet des milliers de compatriotes froidement assassinés par les forces de défense et de sécurité, des handicapés à vie, des orphelins, des veuves, j’en passe, à l’effet de protéger des régimes autocratiques. »
À ses yeux, cette réalité rend toute célébration absurde : « Magnifier une telle armée relèverait de l’absurdité absolue quand on sait toutes les horreurs qu’elle a fait subir au peuple de Guinée qu’elle aurait pourtant dû protéger. »
Une armée sans moyens réels
Sékou Koundouno dresse également un constat amer sur l’état actuel de l’armée, dont les équipements sont largement insuffisants pour assurer une véritable défense nationale. « La Guinée ne possède d’armée de l’air que de nom. Aucun hélicoptère de combat et aucun avion de chasse, ni même des albatros des années 40 ne sont disponibles à la base aérienne. Excepté un petit avion de deux places pour surveiller nos côtes à 300 km », souligne-t-il. La flotte aérienne est, selon lui, inexistante, et même les hélicoptères de combat achetés pour contrer les rebelles dans les années 2000 sont aujourd’hui obsolètes : « Les hélicoptères de combat achetés pendant l’agression rebelle de l’an 2000 ne peuvent plus voler car leur temps de vol a expiré. »
La situation de l’armée de mer n’est guère meilleure, comme il l’indique : « L’armée de mer, inexistante, ne possède que 3 à 4 petites vedettes qui ne peuvent aller en haute mer… La Guinée, malgré son ouverture à la mer, ne possède pas de navires de guerre pour contrer les menaces de tous genres. » Quant à la protection civile, il la dépeint comme inexistante.
Corruption et absence de transparence
M.Koundouno critique également les méthodes d’acquisition des équipements militaires, qu’il considère comme un exemple de corruption systémique. « S’agissant des nouveaux uniformes de l’armée, le Ministère de la Défense n’a procédé à aucun appel d’offres. C’est un marché de gré à gré conclu avec un copain du légionnaire Mamadi Doumbouya qui équipait les GFS qui s’impose et donne lieu à toutes les malversations possibles et imaginables ! » Pour lui, ce favoritisme dans la gestion des fonds publics renforce l’image d’une institution gangrenée par des intérêts privés.
Un appel au réveil des consciences militaires
Face à ce constat accablant, Sékou Koundouno adresse un message direct aux membres de l’institution militaire. « Au vu de ce qui précède, il y a donc très peu de motifs de réjouissances ou de célébrations en raison de l’état actuel de déliquescence de notre armée. J’ose tout de même croire qu’il existe des officiers vertueux et patriotes que cette situation délétère exaspère et révolte au plus haut point et qu’ils en tireront tous les enseignements nécessaires. »
Pour cet activiste, ce 66ème anniversaire devrait être l’occasion de faire le bilan de l’armée et de prendre conscience de son véritable rôle. Dans un pays marqué par des décennies de violences et de répressions, l’armée guinéenne doit, selon lui, retrouver ses valeurs républicaines et se recentrer sur sa mission première : protéger le peuple.
Boundèbengouno, pour Laguinee.info