Il aura fallu moins de 24 heures pour que le silence se brise. Et c’est le Bloc Libéral (BL), dirigé par Dr Faya Lansana Millimouno, qui dégaine le premier. Dans une déclaration sans ambages publiée ce 15 juin, le parti d’opposition condamne vigoureusement la création de la Direction Générale des Élections (DGE), annoncée par décret présidentiel la veille. Pour le BL, cette décision ne marque pas un progrès vers le retour à l’ordre constitutionnel, mais bien “une nouvelle étape dans la confiscation du pouvoir par le CNRD”.
Un organe de trop, un dialogue de trop peu
Le ton est donné dès les premières lignes : la DGE, logée sous la tutelle du très contesté Ministère de l’Administration du Territoire, incarne tout ce que le BL rejette dans la gestion de la transition actuelle. “Depuis l’avènement du multipartisme, ce ministère a toujours joué un rôle partisan, privilégiant les régimes en place et verrouillant les dynamiques électorales à travers ses démembrements et relais locaux”, rappelle le parti. Et de marteler : confier à une direction sous cette tutelle la gestion intégrale du processus électoral, c’est “remettre les clés de la démocratie guinéenne à un organe connu pour son allégeance au pouvoir en place”.
Une démocratie sous perfusion
Dans un contexte où la parole publique est minée par la méfiance, le Bloc Libéral dénonce un “unilatéralisme arrogant”, préférant “l’imposition au dialogue” et “le recyclage des méthodes les plus contestées” à une vraie rupture avec les pratiques du passé. À ceux qui évoquent une autonomie financière de la DGE comme gage d’indépendance, le BL répond par l’ironie : “Il ne suffit pas de décréter l’autonomie financière d’une structure pour la rendre indépendante.” L’indépendance, rappelle le parti, suppose avant tout une autonomie de décision, une composition pluraliste et une résistance aux pressions politiques.
Des élections au goût de déjà-vu
Le BL ravive les plaies encore béantes de scrutins passés : fichiers électoraux contestés, résultats falsifiés, violences meurtrières, impunité. “La défunte CENI, avec tous ses défauts, garantissait au moins une pluralité dans la représentation. Aujourd’hui, cette relative diversité est balayée au profit d’un organe strictement administratif, nommé, contrôlé et orienté par l’exécutif.”
Et l’avenir s’assombrit : si les autorités persistent dans leur logique actuelle, elles ouvriront la voie à des élections “non consensuelles” qui risquent d’embraser à nouveau le pays. “La moindre étincelle peut rallumer la flamme de l’instabilité”, avertit le Bloc Libéral, qui rappelle que la Guinée a déjà trop payé le prix du sang pour des simulacres d’élections.
Des exigences claires, une ligne rouge assumée
Le parti formule ses exigences en termes précis : audit du fichier électoral, transparence sur toutes les étapes du processus, organe électoral technique, indépendant, pluraliste et professionnel, présence permanente d’observateurs électoraux nationaux et internationaux. Le vote, insiste-t-il, ne doit plus relever des “coulisses”, mais être un exercice public, contrôlé, sécurisé et accessible à tous les citoyens.
Un appel à la raison et à la République
Refusant la résignation, le Bloc Libéral appelle à un dialogue politique inclusif, réunissant opposition et pouvoir sur un pied d’égalité, en vue de définir un cadre consensuel de sortie de crise. Pas de faux semblants, pas de manœuvres dilatoires. “Le peuple guinéen a trop souffert des élections truquées, des résultats manipulés, des institutions au service des gouvernants et non des gouvernés.”
Et la déclaration de se conclure sur une note ferme : aucun compromis ne sera fait sur l’essentiel. “La Guinée mérite mieux qu’un simulacre de démocratie. Elle mérite un processus électoral digne, respecté, et respectueux du peuple souverain.”
Laguinee.info