À la 113e Conférence internationale du Travail (CIT), la voix de la Guinée n’est pas passée inaperçue. Le ministre du Travail et de la Fonction publique, Faya François Bourouno, a livré ce mardi une déclaration dense et structurée, présentant devant les délégués du monde entier une trajectoire de transformation ancrée dans la Vision Simandou 2040 et arrimée à l’Agenda du Travail Décent.
Dans une allocution empreinte de diplomatie et de fermeté, le ministre guinéen a d’abord salué l’action du Bureau international du Travail (BIT), notamment son soutien technique qui a permis à la Guinée de renforcer son cadre de gouvernance sociale et de poser les bases d’un système de protection sociale durable. Il a aussi souligné l’importance de l’intégration récente du pays au Programme mondial pour l’emploi, la protection sociale et les transitions justes, qualifiée de « partenariat stratégique déterminant ».
Mais au-delà des formules de gratitude, c’est une véritable feuille de route nationale que Faya Bourouno est venu défendre. Depuis la transition politique entamée le 5 septembre 2021, sous la houlette du président Mamadi Doumbouya, la Guinée a engagé une refondation axée sur trois piliers : social, économique et politique. Trois leviers pour sortir d’un modèle d’exploitation brute et amorcer une transformation durable.
Simandou 2040 : du minerai au développement intégré
Le cœur de cette transformation bat à Simandou. Plus de 60 000 emplois directs ont déjà été créés dans ce projet minier emblématique, fer de lance d’un corridor industriel vert censé redessiner l’économie guinéenne. Une des plus grandes raffineries d’or d’Afrique est en construction, tandis qu’une autre raffinerie d’alumine à Boffa est annoncée. Pour accompagner cette industrialisation, la Simandou Academy forme les jeunes Guinéens aux métiers de demain : industrie, numérique, agroécologie.
Réformes sociales et droit du travail
Sur le volet social, la Guinée se donne les moyens de ses ambitions. La révision du Code du travail, la mise en place d’une assurance maladie universelle déjà étendue au secteur public et aux retraités depuis août 2024 et l’adoption d’une Convention collective dans les mines marquent une rupture avec la précarité. Le Programme Pays pour la Promotion du Travail Décent (2025-2029) vise, quant à lui, à formaliser l’économie informelle et à faire de la sécurité au travail un droit inaliénable.
Une réponse à l’intelligence artificielle et à la mutation du travail
Dans un monde bousculé par l’essor de l’intelligence artificielle, la Guinée ne compte pas rester spectatrice. Le ministre a appelé à une transformation maîtrisée de l’IA en opportunité, soulignant la nécessité de préserver l’emploi tout en valorisant les compétences humaines. Une prise de position lucide sur les menaces systémiques qui pèsent sur le marché du travail mondial.
Un dialogue social en étendard
Faya Bourouno a réaffirmé l’ancrage de la Guinée dans un modèle de gouvernance fondé sur le dialogue social tripartite: syndicat, patronat, État, comme moteur de cohésion et de justice. Dans un contexte mondial où la liberté syndicale recule, ce positionnement sonne comme un choix politique assumé.
Entre ambition et pragmatisme
La déclaration guinéenne à Genève n’était pas une simple formalité diplomatique. Elle a mis en lumière une vision stratégique cohérente, alliant réformes sociales profondes, industrialisation ciblée et ouverture aux mutations technologiques. Reste à transformer cette feuille de route ambitieuse en résultats mesurables, pour que, selon les mots du ministre, « du Port minéralier de Moribaya aux contreforts de Simandou, chaque Guinéen voie son travail reconnu, protégé et porteur d’espérance ».
Laguinee.info