C’est une lettre dont le ton, sans détour, en dit long sur la lassitude d’un corps enseignant à bout de patience. Le Syndicat National Autonome de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (SNAESURS) a adressé, ce 26 mai, un rappel cinglant au ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation. En toile de fond : le non-respect d’engagements jugés essentiels à la stabilité du secteur, et une menace de paralysie générale dès le 10 juin.
Dans ce courrier référencé 13/BEN/2024, dont notre rédaction s’est procuré copie, le Bureau exécutif du SNAESURS dénonce l’inertie de leur ministère de tutelle face à des préoccupations « maintes fois exprimées » et jamais suivies d’effet. La missive s’appuie sur la réunion syndicale tenue le 20 mai 2025, pour faire l’état des lieux d’une série de revendications restées lettre morte.
L’autonomie universitaire en question
Le premier point de friction est symbolique et préoccupant: la gestion centralisée par le ministère des frais d’inscription et de réinscription, qualifiée d’« atteinte aux libertés académiques » par le syndicat. Le SNAESURS dénonce une « confiscation » des prérogatives des établissements supérieurs, pourtant protégées par les textes en vigueur. Plus grave encore : les fonds collectés lors de ces opérations ne seraient toujours pas reversés aux institutions, malgré des engagements officiels pris devant les représentants de la Conférence des Recteurs et Directeurs Généraux (CRDG).
« À ce jour, aucun versement n’a été effectué, plus de deux mois après les assurances du Secrétaire Général du MESRSI », déplore le syndicat. Un silence budgétaire qui passe mal, d’autant qu’il s’inscrit dans un climat de promesses non tenues.
Des primes promises, jamais versées
Autre point de crispation : la prime de fonction, toujours absente de la fiche de paie des enseignants-chercheurs. Le ministère évoque le décret 0027/PRG/SGG du 24 janvier 2024, censé encadrer le régime spécifique du personnel de l’enseignement supérieur. Mais selon le SNAESURS, ce décret reste « inappliqué dans son intégralité ». Une situation qui frustre, épuise, démotive.
À cela s’ajoute l’arrêt brutal du financement des formations de formateurs, perçu comme un sabotage du développement de compétences au sein des universités guinéennes. Pour un secteur déjà miné par la précarité, c’est un coup de plus, et peut-être celui de trop.
Ultimatum clair : le 09 juin ou la grève
Face à ce qu’il qualifie de « surdité institutionnelle », le syndicat hausse le ton et donne au ministre jusqu’au 9 juin 2025 pour répondre favorablement à trois exigences non négociables :
1. Le paiement intégral des frais de formation aux détenteurs des attestations de financement ;
2. Le versement des ristournes dues pour les années universitaires 2022-2023 et 2024-2025 ;
3. L’application complète du décret 0027 sur les rémunérations spécifiques du personnel de l’enseignement supérieur.
Faute de réponse, prévient le syndicat, la grève suspendue en juillet 2023 sera relancée dès le 10 juin. Cette fois, elle s’appliquera sans exception dans toutes les Institutions d’Enseignement Supérieur (IES), les Institutions de Recherche Scientifique (IRS) et les Centres de Documentation et d’Information (CDI) du pays.
Alerte sur les « dérives » du ministère
Plus encore, le SNAESURS avertit : il n’acceptera plus aucune immixtion du ministère dans la gestion interne des établissements. L’inscription des étudiants, l’émission des cartes, ou toute autre compétence prévue par la loi, relèvent exclusivement des IES. Le rappel est ferme, presque menaçant. Il traduit un ras-le-bol syndical qui se veut désormais frontal.
Dialogue ou confrontation ?
Dans une conclusion plus conciliante, les syndicats réitèrent leur disponibilité à un « dialogue franc », mais préviennent qu’ils « ne transigeront plus sur les fondamentaux ». Le ministre, désormais sommé d’agir, joue gros : une rentrée académique 2025-2026 sans perturbation… ou un nouveau bras de fer social.
Laguinee.info