Dabola, située au centre géographique de la Guinée, connaît depuis quelques jours une chaleur extrême, avec des températures qui dépassent les 40°C. Cette situation, rare dans cette région habituellement marquée par un climat relativement modéré, inquiète profondément les autorités locales et les habitants. Le 10 avril 2025, notre équipe s’est rendue à la Direction préfectorale de l’Environnement et du Développement Durable (DPEDD) pour comprendre les raisons derrière ce phénomène caniculaire et ses impacts sur la vie quotidienne.
Un climat atypique et des conséquences inquiétantes
La préfecture de Dabola, connue pour ses paysages montagneux et ses forêts verdoyantes, subit cette année une canicule sans précédent. À 11 heures du matin, les températures avoisinent déjà les 41°C, un chiffre alarmant pour les habitants de cette région. Selon Ismaël Camara, directeur préfectoral de l’Environnement, la situation est sans équivalent dans le passé récent.
« Dabola ne connaissait pas cette chaleur auparavant. Mais depuis que l’exploitation abusive des arbres et la surproduction du charbon ont commencé, nous assistons à des changements dramatiques. Aujourd’hui, nous faisons face à un environnement menacé, et les conséquences sont visibles : la chaleur caniculaire, qui atteint des records cette année, est le fruit des actions humaines », déclare-t-il.
Ce constat inquiétant n’est pas le fruit du hasard. Les causes profondes de cette canicule semblent être liées à des pratiques humaines destructrices telles que la coupe anarchique des arbres pour satisfaire des besoins commerciaux et la surproduction illégale du charbon de bois, une activité largement répandue dans la région.
L’impact des pratiques humaines sur l’environnement local
La coupe des arbres et l’exploitation du charbon de bois ont des effets dévastateurs sur l’environnement. Les arbres, qui jouent un rôle crucial dans l’équilibre écologique, sont souvent coupés sans discernement, ce qui entraîne une déforestation progressive et une perte de biodiversité. Ismaël Camara rappelle que la dégradation de l’environnement local est directement responsable de l’élévation des températures. La chaleur devient insupportable, notamment pour les habitants les plus vulnérables, comme les enfants et les personnes âgées.
« Les maladies liées à la chaleur et aux conditions climatiques extrêmes sont en forte augmentation. Actuellement, 75 à 80 % des maladies dans la préfecture sont liées à des facteurs environnementaux. La chaleur caniculaire est un facteur aggravant, et cela ne fait qu’empirer », poursuit le directeur préfectoral.
La disparition progressive d’espèces animales, telles que les chimpanzés, est également un indicateur majeur de l’impact de l’activité humaine. Ces primates, autrefois nombreux dans la région, contribuaient à maintenir l’équilibre écologique. Aujourd’hui, leur rareté témoigne d’une pression de plus en plus forte sur l’écosystème local.
« Le braconnage est un problème majeur. Les chimpanzés, par exemple, étaient très présents ici à Dabola, mais aujourd’hui, ils sont devenus rares. Les gens les abattent pour diverses raisons. Nous avons donc créé une unité pour lutter contre le braconnage, avec des peines sévères à la clé : jusqu’à 10 ans de prison et une amende de 20 millions de francs guinéens pour les contrevenants », déclare Ismaël Camara.
Des ressources limitées pour une mission cruciale
Les agents de la section Forêts et Faunes de Dabola, chargés de la protection des espaces forestiers et de la faune locale, rencontrent de nombreuses difficultés pour mener à bien leur mission. Le lieutenant Malé 1 Camara, chef de cette section, évoque les défis logistiques qui freinent leur efficacité.
« Nous n’avons qu’une seule moto pour couvrir l’ensemble de la préfecture. C’est insuffisant pour mener des opérations de terrain. Nous devrions avoir des véhicules, des équipements de terrain, pour être en mesure de protéger efficacement les forêts et les espèces menacées », explique-t-il.
Le manque de moyens empêche cette équipe de mener des actions de surveillance et de contrôle efficaces. La section Forêts et Faunes, bien que répressive, manque des ressources nécessaires pour faire face à l’ampleur de la tâche.
Un appel à l’action collective pour préserver l’environnement
Face à ce constat alarmant, les autorités locales appellent à une prise de conscience collective pour lutter contre les causes du réchauffement climatique à Dabola. Le lieutenant Camara lance un appel direct à la population :
« Je demande à toute la population de Dabola de prendre conscience de la situation. La coupe des arbres, notamment des arbres fruitiers, doit cesser immédiatement. Nous devons également limiter la production de charbon. Cela fait partie des pratiques quotidiennes, mais ce n’est pas la solution. Nous devons agir maintenant pour préserver notre environnement, » déclare-t-il.
Il insiste également sur le rôle de chacun dans la lutte contre la déforestation et la préservation des écosystèmes locaux. Les autorités, bien qu’engagées, ne peuvent pas réussir seules. C’est pourquoi un soutien actif de la population est crucial pour préserver les ressources naturelles de Dabola et stopper l’aggravation de la situation climatique.
« Nous ne pouvons pas tout faire seuls. Nous appelons la population de Dabola à s’unir pour protéger nos forêts et faunes. Ensemble, nous pouvons empêcher cette dégradation et préserver notre environnement pour les générations futures », conclut-il.
La canicule record qui frappe Dabola est un symptôme d’un problème plus large : la dégradation de l’environnement local due aux activités humaines. Si la situation reste inchangée, les conséquences pour la santé publique et l’écosystème de la préfecture pourraient être catastrophiques. Les autorités locales, bien qu’engagées, ont besoin de l’aide de la population et du gouvernement pour inverser cette tendance et garantir un avenir durable pour Dabola. Il est donc urgent d’agir pour sauver l’environnement de cette préfecture, dont les ressources naturelles sont gravement menacées par des pratiques nuisibles.
Depuis Dabola, Ahmed Tidiane Condé pour laguinee.info