À 86 kilomètres de la ville de Kankan, la sous-préfecture de Djelibakoro abrite une activité artisanale unique, devenue une véritable tradition familiale. Bien que l’agriculture et l’élevage dominent l’économie locale, une famille, les Dama, perpétue depuis plusieurs générations la fabrication de fusils traditionnels, un outil essentiel pour les chasseurs.
Une tradition familiale bien enracinée
Au cœur d’un grand atelier qui bourdonne d’activités, Siaka Babou Dama, chef de cet établissement familial, raconte avec émotion l’histoire de ce savoir-faire. « Ce travail est un héritage familial. Nous sommes nés dans cette activité. Nos pères et nos grands-pères fabriquaient déjà ces fusils. C’est une pratique transmise de génération en génération dans notre lignée », confie-t-il.
L’atelier, où plus de cinquante apprentis apprennent le métier, ne se limite pas à la confection de fusils. On y fabrique également des outils agricoles comme la daba et la houe, ainsi que des machines décortiqueuses. Toutefois, les fusils traditionnels, particulièrement les calibres 12, restent au centre de cette production artisanale, répondant aux besoins spécifiques des chasseurs locaux.
Une relation harmonieuse avec les autorités
Dans un pays où l’utilisation des armes à feu est strictement encadrée, les artisans de Djelibakoro ont su établir une collaboration apaisée avec les autorités. Siaka Dama insiste sur le respect des règles en vigueur. « Nous ne fabriquons que des fusils utilisés par les chasseurs. Ce sont des outils conçus dans un cadre légal et contrôlé. C’est pour cela que nous entretenons de bonnes relations avec les autorités », explique-t-il, soulignant la conformité de leur activité artisanale.
Un métier qui nourrit, mais qui rencontre des obstacles
Pour la famille Dama, la fabrication de fusils n’est pas qu’une passion ou un héritage. C’est une source de revenus essentielle qui leur permet de vivre décemment. « Grâce à ce métier, nous ne pratiquons plus l’agriculture. Tous nos besoins sont couverts par cette activité : maison, moyens de déplacement, tout provient de notre travail », se réjouit Siaka Babou Dama.
Cependant, malgré cette réussite relative, des défis persistent. Le manque d’électricité, indispensable pour faire fonctionner les moteurs de soudure et d’autres équipements, freine la production. « Nous manquons de matériel de travail. Les pannes de courant nous ralentissent. Si le gouvernement pouvait nous aider à moderniser notre atelier, cela nous permettrait de développer davantage cette activité », plaide Siaka.
Le marché, bien que présent, reste également instable. Les périodes de forte demande alternent avec des moments de ralentissement économique, rendant les revenus irréguliers.
Un modèle pour le développement rural
Au-delà des bénéfices économiques pour la famille Dama, cette activité artisanale a un impact social important. Elle offre une alternative à l’inactivité pour les jeunes de la région, réduisant ainsi le risque de délinquance. Par ailleurs, elle valorise un savoir-faire local, préservant une tradition tout en répondant à des besoins contemporains.
Soutenir de telles initiatives pourrait avoir des effets positifs sur le développement rural en Guinée. En modernisant l’atelier de la famille Dama et en renforçant leur capacité de production, le gouvernement ou d’autres partenaires pourraient non seulement préserver une tradition ancestrale, mais aussi renforcer l’économie locale.
De Kankan, Karifa Kansan Doumbouya, pour Laguinee.info