jeudi, janvier 23, 2025
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Transition guinéenne : une lutte contre la corruption ou un bal masqué ?

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Lorsque la junte militaire du CNRD a pris le pouvoir en septembre 2021, elle avait fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille. Fini le laxisme, finie l’impunité, avait-on promis. Le vent du changement soufflait, porteur d’espoir pour un peuple lassé des scandales financiers à répétition. Mais, quelques années plus tard, le paysage ressemble davantage à une foire aux détournements qu’à une croisade pour la transparence. Entre les milliards envolés et les lingots disparus, la Guinée semble aujourd’hui engagée dans une compétition officieuse : qui détournera le plus sans se faire prendre ?

Jetons un coup d’œil à cette scène rocambolesque qui se joue sous nos yeux. À la Douane, ce ne sont pas moins de 700 milliards de francs guinéens qui se sont évaporés dans la nature selon les informations. À l’Office guinéen de publicité, ce sont 78 milliards, soit l’équivalent de plusieurs années de budget pour certaines institutions publiques, qui se seraient volatilisés. Plus spectaculaire encore, le Patrimoine bâti public, censé être le garant des biens immobiliers de l’État, dernier cas en date, on parle de 267 milliards, sans que personne ne semble retrouver la clé du coffre. Et que dire de la Banque centrale de la République de Guinée, où 4 tonnes d’or ont mystérieusement disparu comme par enchantement ?

À ce rythme, on se demande si la transition n’est pas devenue un gigantesque « Black Friday » du détournement, où chacun se sert à sa guise en attendant que l’orage passe. On pourrait presque croire à une mise en scène d’un film policier, sauf que dans cette affaire, les coupables ne se cachent même plus. Entre les fuites dans la presse, les rumeurs persistantes et l’inaction apparente des autorités, le doute s’installe. Le gouvernement est-il dépassé ou complice ? La question mérite d’être posée.

Une lutte anticorruption au point mort ?

Lorsqu’il s’agit de faire des annonces spectaculaires, le CNRD sait y faire. Commissions d’enquête, audits, suspensions temporaires… La machine de communication tourne à plein régime. Mais une fois les projecteurs éteints, la réalité est tout autre. Les dossiers s’empilent, les accusés disparaissent des radars et, au final, l’impression qui domine est celle d’une justice sélective, où certains échappent miraculeusement aux mailles du filet pendant que d’autres servent de boucs émissaires pour calmer l’opinion publique.

Ce qui frappe surtout, c’est l’absence de mesures concrètes et durables. Où sont les réformes promises pour verrouiller les circuits financiers ? Où sont les dispositifs de contrôle censés empêcher ces détournements massifs ? Visiblement, le robinet des finances publiques continue de couler à flot, irriguant des comptes bancaires bien éloignés des caisses de l’État.

Des scandales en série, un peuple résigné

Face à ces affaires à répétition, les Guinéens oscillent entre résignation et colère contenue. La confiance envers les autorités s’effrite à chaque nouveau scandale. Beaucoup se demandent si, finalement, la transition n’a pas simplement remplacé une élite corrompue par une autre, avec des méthodes plus discrètes mais tout aussi dévastatrices.

Pendant ce temps, les besoins criants du pays restent insatisfaits. Routes délabrées, hôpitaux sous-équipés, écoles en ruine… Tandis que des milliards s’évaporent dans des comptes offshore ou sous des matelas bien garnis, le citoyen lambda, lui, peine à joindre les deux bouts.

Quelle issue pour cette transition ?

Il est encore temps pour le CNRD de redresser la barre, mais le temps presse. La lutte contre la corruption ne peut se limiter à des slogans ou des coups d’éclat médiatiques. Elle doit se traduire par des actions concrètes, des réformes structurelles et, surtout, des sanctions exemplaires, sans distinction de rang ou d’appartenance politique. Car à ce rythme, la transition risque de se terminer en fiasco, laissant un goût amer de promesses trahies.

L’histoire nous enseigne qu’aucun régime ne survit longtemps aux scandales financiers répétés. La Guinée a une chance unique de briser le cycle infernal de la corruption, mais encore faut-il que les dirigeants aient le courage d’aller au bout de leurs engagements. En attendant, la population guinéenne observe, impuissante mais lucide, et espère qu’un jour, la lumière sera faite sur ce qui ressemble de plus en plus à une vaste mascarade.

Après tout, comme le dit un proverbe bien connu : « Quand la chèvre broute l’herbe, ce n’est pas pour le compte du berger. »

 

Laguinee.info

 

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