Les eaux déjà troubles de la transition guinéenne viennent de connaître un nouveau remous. Après le retrait de maître Mohamed Traoré du Conseil National de la Transition (CNT), les Forces Vives de Guinée ont demandé à leurs représentants de quitter toutes les institutions de la transition. Pour elles, ces structures sont devenues « illégitimes ». Le leader du Bloc Libéral, Dr Faya Millimouno, a salué cette décision, qu’il qualifie de « logique ». Cependant, son parti reste dans l’expectative quant au sort de son unique représentante au CNT.
Une logique de cohérence
Lors d’un entretien accordé à Africaguinee.com, Dr Millimouno a applaudi la démarche des Forces Vives, tout en soulignant son caractère inéluctable. « Dès lors que les institutions sont périmées, il faut tirer les bonnes conclusions« , a-t-il affirmé.
Selon lui, la situation actuelle découle d’une transition prolongée au mépris des accords initiaux entre le CNRD, le gouvernement et la CEDEAO, qui fixaient la fin de cette période au 31 décembre 2024. Pour Dr Faya, « les organes de la transition n’ont plus ni légalité, ni légitimité », une position qu’il relie à des principes républicains qu’il estime fondamentaux.
Une décision en suspens
Quant à savoir si le Bloc Libéral suivra l’exemple des Forces Vives, le leader se veut prudent. « Le parti, ce n’est pas Faya Millimouno« , a-t-il martelé, insistant sur le respect du processus interne. Une réunion du bureau politique est prévue pour trancher la question.
Pourquoi une telle prudence ? Selon Dr Faya, le contexte politique est marqué par une incapacité chronique à respecter les engagements. Il a rappelé des épisodes similaires sous les régimes de Lansana Conté et Alpha Condé, où des institutions prorogées étaient devenues des symboles d’illégalité.
Des précédents évocateurs
Ce n’est pas la première fois que le Bloc Libéral se heurte aux pratiques controversées des autorités. En 2019, Dr Faya et d’autres membres du parti avaient été violemment réprimés lors d’un sit-in dénonçant la prorogation du mandat des députés. Jugés en 2022 sous le régime du CNRD, ils gardent encore les stigmates de cette bataille pour la légalité.
Une mise en garde implicite
S’il reste mesuré, Dr Faya n’hésite pas à envoyer des signaux clairs aux autres formations politiques. Ignorer les décisions des Forces Vives serait, selon lui, une grave erreur. Il a rappelé qu’en 2012, sous Alpha Condé, certains partis avaient eu le courage de retirer leurs membres des institutions, facilitant une recomposition salutaire.
Le Bloc Libéral, pourtant critique vis-à-vis des autorités, a toujours su faire preuve de pragmatisme. Si la décision de se retirer du CNT est adoptée, elle marquerait un tournant dans son positionnement. En attendant, Dr Faya, fidèle à son habitude, ménage le suspense : « Dès que la décision sera prise, elle sera rendue publique. »
Un coup de théâtre en vue ?
Alors que les regards sont tournés vers le bureau politique du Bloc Libéral, une question reste en suspens : le parti osera-t-il aller jusqu’au bout de sa logique ? Ou cédera-t-il à la tentation, souvent dénoncée, de concilier principes et intérêts ?
En politique guinéenne, il est toujours risqué de parier sur la cohérence. Mais avec Dr Faya Millimouno, un acteur connu pour son franc-parler et sa rigueur, l’issue de ce feuilleton promet d’être tout sauf anodine.
Laguinee.info