Face à l’inertie du gouvernement dans l’application des accords, le Syndicat National Autonome de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (SNAESURS) a décidé de déclencher une grève de six jours à partir de mercredi prochain. Dans une interview accordée Mediaguinee.com, Noumoukè Kanté, enseignant chercheur et porte-parole du syndicat, appelle à l’union sacrée des enseignants pour faire front commun dans ce combat qu’il qualifie d’inévitable.
Le non-respect des engagements : une provocation pour le SNAESURS
Pour Noumoukè Kanté, le constat est amer. «La décision repose sur un constat amer : le gouvernement n’a pas respecté ses engagements. Tous les points que nous réclamons sont déjà intégrés dans le protocole signé, mais depuis 2023, rien n’a été mis en œuvre. C’est ce manque de respect du protocole qui nous a conduits à déclencher un mouvement de grève pour six jours ouvrables et tacitement renouvelables et cela en accord total avec les membres de notre bureau exécutif, les présidents des coordinations et les secrétaires généraux des sections.» Cette grève est donc une réponse directe à ce qu’il décrit comme un mépris envers les enseignants chercheurs, qui attendent toujours l’application de leurs droits.
Des pratiques inquiétantes dans le traitement des dossiers
Dans ses échanges avec la Fonction publique, M.Kanté dit avoir observé des démarches qu’il juge suspectes. «Récemment, le secrétaire général de la Fonction Publique m’a contacté pour discuter sur le cas d’un enseignant à l’Université de Sonfonia. Cependant, nous avons remarqué que le ministère de la Fonction publique a commencé à interroger les homologues sur leurs qualifications. Des questions comme à quelle institution ils appartiennent. Ou encore quelles sont les matières qu’ils dispensent ? Quel est le niveau de leur diplôme ? Nous,nous pensons que cela soulève des questions, surtout que ces informations sont déjà dans leur base de données». Pour lui, ces questions sont un signe inquiétant d’ingérence et de manque de transparence dans le traitement des dossiers des enseignants. «Soupçonnant une manœuvre cachée derrière ces démarches, le bureau exécutif national s’est réuni et a décidé de demander aux homologues de ne répondre à aucune question de la part de qui que ce soit.»
Rumeurs d’infiltrations : le SNAESURS répond aux accusations
Des rumeurs circulent sur des tentatives d’intégration de proches et de connaissances dans la liste des enseignants homologués, mais Noumoukè Kanté les réfute fermement. «Nous l’avons aussi appris, mais je peux vous assurer que ces rumeurs ne sont pas fondées. Nous avons vérifié la liste des homologues, et tous les noms figurant dessus sont bien ceux d’enseignants homologues qualifiés. Nous avons travaillé en transparence avec la Fonction publique pour garantir l’intégrité de cette liste». Il insiste : «Parce que le projet d’arrêté, je vous avais dit ça à un moment donné, qu’il y avait certains noms qui ont été mal saisis. Sinon les 827 homologues, il y avait leur nom, il y avait leur filiation, il y avait tous les renseignements offerts, les diplômes et tout ce qui s’ensuit. Mais dire qu’il y a quelqu’un de la Fonction publique qui aurait tenté d’infiltrer des gens sur la liste, je l’ai dit personnellement aux ministres ; que très honnêtement, nous ne pouvons infiltrer quelqu’un là-dessus, mais je ne crois pas aussi que quelqu’un a pu infiltrer qui que ce soit là-dessus». Le syndicaliste rassure qu’aucun enseignant étranger à l’institution n’a été ajouté à la liste.
Recrutement d’enseignants étrangers : un besoin mais non sans vigilance
Pour combler le déficit en docteurs (PhD) en Guinée, l’arrivée d’enseignants étrangers a été envisagée. M.Kanté n’y voit pas de problème tant que cela respecte les compétences requises. «Je ne pense pas que cela retarde le dossier des homologues. Les 877 enseignants concernés sont tous Guinéens, et l’intégration d’experts étrangers peut être bénéfique si ces derniers sont qualifiés. Cependant, cela ne doit pas se faire au détriment des engagements envers nos propres enseignants». Toutefois, il reste vigilant quant à l’importance de respecter les qualifications et l’expertise des nouveaux venus : «Mais ce serait quand même que ceux-là qui viennent, aient l’expertise, la connaissance et le bon sens d’enseigner».
Un appel fort à l’unité et à la solidarité pour les enseignants chercheurs
En appelant à la mobilisation, Kanté insiste sur la nécessité pour tous les enseignants chercheurs de suivre le mot d’ordre de grève. «Je demande à tous les enseignants chercheurs de suivre le mot d’ordre de grève durant les six (6) jours ouvrables. Ils n’ont rien à gagner dans la division, que tu sois quelqu’un qui a aimé l’enseignement supérieur ou que tu sois enseignant chercheur, je demande à tout le monde de s’unir comme un seul homme pour gagner ce combat-là» Pour lui, la division ne profiterait qu’à ceux qui s’opposent à la réforme et à l’évolution du système éducatif.
Alors que la grève approche, les enseignants restent dans l’attente d’une réponse gouvernementale. Le SNAESURS ne cache pas son intention de prolonger le mouvement si les demandes ne sont pas satisfaites. Cette grève, bien plus qu’une simple interruption, est pour le syndicat un ultimatum, un appel à la justice et à la reconnaissance des enseignants chercheurs guinéens.