Le 02 octobre, date historique marquant l’indépendance de la Guinée, a été célébrée à Siguiri. Cependant, malgré l’ampleur de cet événement, des lacunes organisationnelles ont terni la fête, suscitant des frustrations au sein de la population et des autorités locales.
Depuis trois jours, les autorités s’étaient attelées aux préparatifs, incluant des programmes d’assainissement et la distribution de t-shirts. Mais malgré l’engagement pour la fermeture des magasins et boutiques, et l’enthousiasme manifeste des élèves à vouloir prendre part aux festivités, le lancement officiel s’est déroulé dans une atmosphère terne. Le discours du préfet, censé être l’un des moments phares, a été prononcé en l’absence de la foule, un constat qui a inquiété les organisateurs. L’absence de véritable battage médiatique par la presse locale de Siguiri a été pointée du doigt comme ayant contribué à cette faible mobilisation initiale.
Cependant, à partir de 11 heures, la Place des Martyrs s’est rapidement remplie d’une foule venue de divers horizons, grâce à des appels relayés de bouche à oreille. Parmi les personnes présentes, certaines avaient des ressentiments face à l’organisation. Une commerçante rencontrée au marché, qui a préféré garder l’anonymat, nous confie : « Nous avons entendu que tout le monde est invité à cette fête, qui est une fête pour tous. Même sans appel, l’on doit participer, car à mon avis, elle symbolise notre liberté. Mais si nous pensons à nos marmites, nous ne pouvons pas être dans la même joie que nos amis qui sont dans les bureaux et dans les affaires. Mon frère, je jure que là où je suis assise, j’ai une plaie causée par le chapelet, mais que faire ? Si je ne viens pas, mon mari et mes enfants resteront comme ça. Mon mari ne travaille plus, car les mines sont fermées. Que faire ?». À la fin de ses propos, des larmes coulaient déjà sur ses joues.
Une autre femme, visiblement affectée par la situation économique, a pris la parole pour exprimer son point de vue : « À Conakry, le président, à mon avis, a demandé aux gens de fêter chez eux. Et nous, nous ne fêtons pas l’indépendance, mais plutôt le président. Je ne suis pas contre le président, car c’est à son époque que j’ai eu de l’argent pour pouvoir chercher mes marchandises dans les villages et les vendre, afin de subvenir à mes besoins et à ceux de mes enfants. Mon mari est décédé, voilà. C’est ça. Merci à bon entendeur, salut».
Malgré cette divergence de perspectives, certains ont préféré célébrer à leur manière, comme l’explique une autre participante que nous avons interrogée devant une boutique animée : « Moi, je suis très contente aujourd’hui, même si cela s’est transformé en fête du président. Pourtant, le président, dans son discours, n’a parlé que du peuple guinéen. C’est notre fête, donc tous les Guinéens doivent être contents de ça. Longue vie à notre nation et longue vie à notre bien-aimé Mamadi Doumbouya. Mais c’est notre façon de fêter, près de nos semblables qui n’ont même pas quelque chose à manger. On fait de la viande, eux et nous mangeons en partageant, peut-être qu’elles peuvent oublier certaines choses car la vie aujourd’hui est chère, si on doit se dire la vérité. », a conclu la dame avec un large sourire.
Malgré l’engouement final, certains aspects de la fête ont suscité de la déception, notamment l’organisation des défilés, qui a été la principale source de frustration pour certains venus de loin. La gestion de la sécurité, incapable de maîtriser le débordement de la foule, a également soulevé des inquiétudes. Les autorités devront, à l’avenir, prendre des mesures pour une meilleure coordination, incluant la participation de toutes les couches sociales, tout en s’assurant de respecter l’organigramme des invités et les mesures de sécurité.
La fête du 02 octobre à Siguiri, bien qu’empreinte d’un esprit de célébration, a démontré que des efforts restent à faire pour garantir une organisation plus inclusive et plus fluide.
De Siguiri, Ousmane OC Cissé, pour Laguinee.info