À l’occasion du 66e anniversaire de l’indépendance de la Guinée, l’artiste engagé Elie Kamano a fait une déclaration fracassante sur son compte Facebook, dénonçant la gouvernance actuelle et refusant de participer aux festivités. Selon lui, l’indépendance guinéenne ne peut être célébrée dans les conditions actuelles.
« L’indépendance ?? Elle ne se fête pas avec des gens qui ont des dents moins blanches que les linceuls de Guinéens fraîchement assassinés, kidnappés et oubliés par la récente histoire de notre pays », a-t-il écrit, pointant du doigt les dérives politiques et la répression. L’artiste s’en prend ainsi directement aux responsables qu’il accuse de gouverner dans le sang et la division : « Elle ne se fête pas avec ceux qui ont choisi d’entacher leurs mains du sang de leurs concitoyens pour une divergence d’idée et de vision. »
Le reggaeman a exprimé son rejet d’une indépendance célébrée par des élites qu’il considère déconnectées des réalités du peuple, dénonçant « ceux qui font la promotion d’une dictature virulente, du recul de la démocratie et de la liberté d’expression ».
Pour lui, ces dirigeants privilégient le luxe et le confort, laissant la population dans la misère : « Pas avec ceux qui ont choisi le champagne pour eux et non l’eau potable pour le peuple. Pas avec ceux qui ont choisi le paradis pour eux et l’enfer pour le peuple. »
M.Kamano s’en prend aussi aux inégalités dans le système éducatif, accusant les autorités d’envoyer leurs enfants dans les meilleures écoles du monde tandis que les écoles guinéennes sont laissées à l’abandon : « Ceux qui, avec l’argent du contribuable guinéen, ont choisi d’envoyer leurs enfants dans les plus grandes écoles du monde, pendant que les autres végètent dans les écoles délabrées et pléthoriques en Guinée. »
Il critique aussi les conditions de vie déplorables du peuple guinéen : « Non, pas avec ceux qui ont choisi l’électricité pour eux et l’obscurité pour le peuple. L’insolence dans l’opulence pour eux et la précarité pour le peuple. »
L’art va jusqu’à refuser de célébrer cette indépendance, qu’il considère souillée par les pratiques des dirigeants actuels : « Non, je refuse de fêter une indépendance souillée par des esclaves de salon, qui salissent la mémoire du père de notre nation AST, qui avait proclamé notre indépendance dans un esprit souverain et décomplexé. »
Il dénonce ce qu’il voit comme une manipulation des consciences, un effort pour redorer une gouvernance qu’il décrit comme « pétrie de pratiques malsaines, dangereuses, machiavéliques et impérialistes ».
Le point culminant de sa critique est la comparaison de Doumbouya à des figures historiques controversées, marquant la déception de l’artiste face à l’évolution de celui qui devait être un libérateur : « Je refuse de danser et de sauter au nom d’une indépendance avec celui qui était censé être notre Mandela, qui est malheureusement devenu notre Bokassa. Qui était censé être notre Moïse, qui est malheureusement devenu notre pharaon aux oreilles bouchées et au cœur endurci par la boulimie du pouvoir. Qui était censé être notre Jésus, qui est malheureusement devenu notre Ponce Pilate. Qui était censé être notre De Gaulles, qui est malheureusement devenu notre Hitler. »
Malgré la dureté de ses propos, Elie amano termine sa déclaration en adressant ses vœux au peuple guinéen : « Bonne fête d’indépendance au peuple de Guinée ». Cependant, il est clair qu’il se désolidarise des célébrations officielles, considérant qu’elles trahissent l’esprit de l’indépendance proclamée il y a 66 ans, et qu’elles ne sont qu’un écran de fumée masquant une réalité sombre pour la majorité de la population.