Trois ans après la prise de pouvoir par le CNRD en Guinée, les opinions des activistes de Kankan divergent sur la gestion du pays par les militaires. Entre déception et satisfaction, chacun exprime son point de vue sur la transition en cours.
Le 5 septembre 2021, le colonel Mamady Doumbouya et ses forces spéciales renversaient Alpha Condé, mettant fin à onze années de pouvoir. Depuis, les militaires gouvernent la Guinée sous la bannière du Comité National de Rassemblement et du Développement (CNRD). Alors que le pays marque les trois ans de ce coup d’État, les activistes de Kankan, à travers une série d’interviews, se sont exprimés sur le bilan de cette période de transition.
Antoine Dogbo Guilavogui, secrétaire fédéral de l’UFDG à Kankan, ancien partisan du coup d’État, n’a pas mâché ses mots face à la gestion des militaires. « La Guinée est un autre pays dans le monde entier, tout ce qui viennent on ne fait que les tromper. Moi qui vous parle, j’avais beaucoup apprécié le président Mamadi Doumbouya parce que son discours était franc, il a touché le cœur de tous les Guinéens. Mais c’est le terrain qui commande », a-t-il déclaré avec amertume.
Selon lui, il existe une « déviation très forte » entre les promesses et la réalité. Il cite les carences en eau, électricité et infrastructures de base comme exemples du manque de progrès. Pour lui, la corruption reste endémique : « L’impunité est là, les milliards que les ministres, les directeurs et DAF d’Alpha Condé ont pris roulent toujours ».
À l’inverse, le président de l’Union des Patriotes pour le Développement de la Guinée (UPDG) voit les choses différemment. « Ce qu’on constate, c’est l’éradication de l’ethnostratégie et de l’ethnocentrisme, les infrastructures routières sont en cours dans presque toutes les préfectures. Nous sommes à un pas des élections avec l’avant-projet de la nouvelle constitution déjà fait».
Il se dit globalement satisfait de la gestion du CNRD, accordant une note positive à 80 % à leur bilan.
Dans les rangs du RPG Arc-en-ciel, les voix sont moins indulgentes. Sory Sanoh, membre influent, déplore le recul des libertés et l’inefficacité de la transition. « Ce que je peux dire, c’est qu’il y a plus de regrets que de joie. Premièrement, l’engagement pris par le CNRD à travers la charte qu’il a lui-même rédigée, et l’accord sur la durée de la transition avec la CEDEAO, sont voués à l’échec».
Il critique également la répression des libertés d’expression et de manifestation, ainsi que les disparitions inquiétantes, comme celles de Foniké Menguè et Billo Bah, portés disparus depuis deux mois.
Le bilan des trois ans du CNRD en Guinée divise les activistes de Kankan. Alors que certains saluent les progrès réalisés dans les infrastructures et la gouvernance, d’autres dénoncent la persistance de l’impunité et des carences en droits fondamentaux. La transition reste une source de débats animés à travers le pays.
De Kankan, Karifa Kansan Doumbouya, pour Laguinee.info