jeudi, novembre 21, 2024
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Manéah: A la rencontre des femmes qui cassent les pierres pour subsister!

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A Manéah, dans la préfecture de Coyah, un tableau saisissant de la réalité des femmes se dévoile dans la carrière Somiag. Leur visage témoigne des luttes quotidiennes, des souffrances, mais aussi de la résilience et de la dignité qui les animent.

La plupart de ces femmes sont veuves, confrontées à des défis immenses de subsistance. Le manque de moyens, de nourriture et d’autres nécessités de base les poussent à descendre dans la carrière pour répondre à certains de leurs besoins les plus pressants. En cette période de mars, mois de la femme, la rédaction de laguinee.info, à travers l’un de ses journalistes, vous emmène en immersion dans cette localité, pour témoigner de leur quotidien souvent méconnu.

Somiag, cette carrière nichée à Manéah marché-néné, devient le théâtre de leur lutte pour la survie. À première vue, le cœur se serre face à la scène qui se déroule sous nos yeux. Des femmes et leurs enfants, sous le joug du soleil implacable du mois de ramadan, s’attellent à la tâche épuisante de casser des pierres du matin jusqu’au soir.

Parmi elles, Kadiatou Camara, assise sur un tas de pierres brisées, marteau en main, incarne la détermination et la résolution qui animent ces femmes. Chaque coup porté sur la pierre semble être un acte de résistance, une affirmation de leur force face à l’adversité.

Dans leurs yeux fatigués se lit toute la dignité d’une lutte quotidienne pour la survie. Leur histoire, souvent oubliée ou négligée, mérite d’être entendue et comprise. Ces femmes, malgré les obstacles, continuent d’avancer avec courage et détermination, un exemple de résilience et de bravoure qui mérite d’être célébré en ce mois dédié à la femme.

« Je fais ce travail pour avoir de l’argent. Mon mari ne travaille pas. Nous nous débrouillons ici, pour nourrir nos enfants, payer leur scolarité », a raconté  Kadiatou Camara, pendant que le marteau monte et descend.

Dans ce lieu, se côtoient toutes les catégories de femmes aux moyens insuffisants pour survivre, mais celles qui marquent le plus les esprits, ce sont les veuves. Leur présence emplit cet endroit d’une aura particulière, empreinte de courage et de résilience, mais aussi de douleur et de solitude.

Chaque jour, ces veuves se lèvent avec le poids des responsabilités qui reposent sur leurs épaules fragiles. Elles affrontent la dure réalité de la vie sans l’épaule sur laquelle s’appuyer, sans le regard réconfortant d’un être aimé. Leurs yeux, empreints de tristesse et de détermination à la fois, racontent des histoires de lutte et de survie.

Dans cet environnement où la force brute est souvent mise à l’épreuve, ces femmes se distinguent par leur résilience et leur capacité à surmonter les épreuves les plus insurmontables. Elles sont les piliers invisibles de cette communauté, portant sur leurs épaules non seulement leur propre fardeau, mais aussi celui de leurs enfants et de leur famille. « Nous sommes là, nos enfants sont trop petits d’abord. J’ai perdu mon mari. Aujourd’hui, j’ai la charge de 11 personnes. Ces enfants sont à l’école. Où je vais gagner les frais de leur scolarité et la nourriture? Si je ne descends pas ici,  je ne peux pas les nourrir. Nous le faisons pour vivre», raconte Bountouraby Camara les yeux rivés sur le marteau qu’elle utilise avec dextérité.

Leur présence dans cet endroit, leur travail acharné sous le soleil brûlant, leur détermination à assurer un avenir meilleur pour leurs enfants sont autant de témoignages de leur force intérieure. Malgré les difficultés, malgré les obstacles, elles continuent d’avancer avec dignité, inspirant respect et admiration à tous ceux qui croisent leur chemin.

Leur choix de casser les pierres dans la carrière plutôt que de se retrouver assises dans les marchés est empreint d’une profonde réalité. Pour ces femmes, la peur de s’endetter et de ne pas pouvoir subvenir aux besoins essentiels de leur famille les pousse à embrasser ce dur labeur, malgré ses exigences physiques et mentales épuisantes.

Elles ont conscience que les maigres bénéfices qu’elles pourraient tirer de la vente sur les marchés ne suffiraient pas à couvrir les dépenses vitales telles que les frais de scolarité, le logement, la nourriture, et tant d’autres. Dans un pays où la survie est une lutte quotidienne, chaque décision est prise avec précaution, chaque action est motivée par le désir ardent de garantir un avenir meilleur pour leurs familles.

Même les enfants scolarisés ne sont pas épargnés par cette réalité implacable. Pendant leurs jours de repos, ils rejoignent leurs mères dans la carrière, contribuant ainsi à l’effort familial. Parmi eux, une jeune fille, courageusement, a partagé son histoire, révélant qu’elle poursuit ses études malgré les défis et les obstacles rencontrés sur son chemin :

« Je fais la 6e année. Je ne suis pas allée à l’école aujourd’hui, c’est pourquoi je suis là. Je viens aider Maman», brosse-t-elle toute épuisée.

La réalité du quotidien dans cette carrière est dure à avaler. Le prix d’une brouette de granite oscille entre 15.000 et 20.000 francs guinéens, une somme dérisoire au regard des difficultés rencontrées par ces femmes. Dans cette conjoncture économique précaire, l’idée d’acquérir un simple camion semble un rêve lointain, presque inaccessible.

Ces femmes, pour qui chaque centime compte, se battent pour chaque pierre cassée, pour chaque brouette remplie. Leur labeur acharné, sous le soleil brûlant, est une lutte quotidienne pour la survie, une quête perpétuelle pour assurer un avenir meilleur à leurs enfants.

La pauvreté qui règne dans cette carrière contraste violemment avec la richesse des ressources que ces femmes extraient jour après jour.

Unies dans la souffrance !

Leur labeur acharné dans cette carrière laisse des marques profondes, visibles tant physiquement que mentalement. Leurs corps, témoins muets de leur endurance et de leur résilience, portent les stigmates de journées entières passées sous un soleil implacable, à briser des pierres sous l’effet répétitif du marteau.

Les mains, autrefois douces et délicates, sont désormais rugueuses et calleuses, marquées par les cicatrices de l’effort incessant. Chaque coup porté sur la pierre est une épreuve de force et de courage, mais aussi une nouvelle blessure infligée à un corps déjà éprouvé par les rigueurs du travail.

« Une fois la nuit tombée, c’est tout mon corps qui me fait mal », confie l’une d’entre elles, le regard empreint de fatigue et de résignation. Leurs mains sont leur outil de travail, mais aussi leur fardeau, constamment soumises à la douleur et à l’épuisement.

Pourtant, malgré les souffrances physiques et les maux qui les accablent, ces femmes restent solidaires, unies par une même lutte pour la survie. Leur organisation en équipe leur permet de partager le fardeau, de s’entraider dans les moments difficiles.

Chaque jour, elles se relaient, travaillant chez l’une puis chez l’autre, partageant le poids du travail et la responsabilité de subvenir aux besoins de leur famille. Dans cette solidarité naît un sentiment de communauté, une force collective qui les aide à surmonter les obstacles avec dignité et détermination.

Comment obtenir des blocs à casser ?

Pour obtenir les blocs à casser, un processus complexe est nécessaire. Tout commence par l’achat de fagots, parfois coûteux, atteignant parfois jusqu’à 300 000 FG ou plus. Ensuite, les femmes allument un feu sous les gros blocs pour les fragiliser. Elles engagent ensuite des hommes pour les aider à casser ces gros morceaux en morceaux plus petits. Enfin, elles interviennent elles-mêmes pour finaliser le travail. C’est ainsi qu’elles parviennent à obtenir les pierres à casser, dans un processus qui requiert une force et une coordination remarquables. Les témoignages révèlent une réalité de travail dur et de détermination inébranlable :

« Nous achetons des fagots. Parfois, ça coûte 300.000 fg voire de plus. Après, nous mettons du feu sur les gros blocs que vous voyez. À ce niveau, nous payons des hommes pour nous aider à casser en des morceaux. Et nous, à notre tour, nous venons pour finaliser le travail. Donc, il y a toute une série d’activités de forces réunie. »,  poursuit Bountouraby Camara.

La question qui fait pleurer?

Le cri de ces femmes résonne dans l’obscurité de leurs conditions de vie difficiles. Elles lancent un appel désespéré aux âmes généreuses, implorant l’aide de ceux qui ont le pouvoir de changer leur destin. Leur détermination à subvenir aux besoins de leurs familles est palpable dans chaque mot prononcé, dans chaque geste de leurs mains usées par le travail.

Pendant ce mois de ramadan, leur fardeau est encore plus lourd à porter, mais leur résilience reste inébranlable. Elles se demandent avec une sincérité poignante : « Si tu ne le fais pas, tu vas consommer quoi ? » Cette question simple résume toute la complexité de leur réalité, où chaque jour est une lutte pour la survie, où chaque geste est un acte de résistance contre l’adversité.

Pourtant, malgré leur souffrance, leur voix reste souvent inaudible, leur lutte souvent ignorée. Le mois de la femme, censé célébrer leur force et leur résilience, révèle paradoxalement leur vulnérabilité dans une société où les inégalités persistent et où les plus démunies restent souvent dans l’ombre.

Ibrahima Alhassane Camara, pour Laguinee.info

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