Difficile de savoir si la bataille opposant le Front national pour la défense de la Constitution (Fndc) au gouvernement guinéen aura lieu. Mais les parties ont, chacune, choisi des avocats français.
Selon certains commentateurs, “Alpha Condé et ses partisans n’y vont-ils pas pour gaspiller des milliards de francs qui auraient mieux servis dans les hôpitaux, écoles et rotes guinéennes ?“
Le Fndc avait vu juste en soumettant une requête auprès de la Cour de justice de la Cedeao, en février, et un signalement auprès de la Cour pénale internationale (CPI) de la Haye, en avril. Si dans le cas du dossier devant la Cour de la Cedeao le gouvernement guinéen ne s’était pas empressé de réagir, dans celui de la CPI, il n’a pas perdu du temps pour le faire.
Pour quelles raisons Alpha Condé a-t-il pris les dispositions nécessaires pour se préparer à riposter au signalement du Fndc ? Pour des commentateurs, “Alpha Condé sait qu’à la Cour de Justice de la Cedeao, ce sont des juges de pays membres qui y siègent. Des juges qui sont influençables par leur gouvernement. Alpha Condé pourrait appeler le gouvernement du pays d’origine de ces juges afin d’obtenir leur indulgence. Sinon, ces juges de la Cedeao auraient osé répondre favorablement à la requête du Fndc. Surtout qu’ils ont vu que le gouvernement guinéen a refusé de respecter les recommandations des experts électoraux de la Cedeao, donc du même organisme qu’eux. Ce genre d’arrangements ne peut pas se faire à la Cpi où les Juges ont les moyens d’être indépendants“.
William Bourdon & Associés c. Jean-Paul Benoît &Jean-Pierre Mignard
C’est probablement la raison qui a motivé Alpha Condé et ses conseillers de confier ce dossier de signalement auprès de la CPI aux avocats Jean-Paul Benoît & Jean-Pierre Mignard, plutôt qu’à l’Agent judiciaire de l’État. Mais ces avocats du chef de l’État guinéen pourront-ils démonter les faits exposés par ceux du Fndc ?
Pour nombre de commentateurs, “il leur sera impossible de le faire. Le dossier présenté par le Cabinet de Me William Bourdon est solide alors que celui du gouvernement ne tient pas debout. C’est comme un sac vide. Les victimes sont les populations désarmées. Leurs bourreaux sont des forces gouvernementales. Les commanditaires sont des dirigeants gouvernementaux et de la mouvance présidentielle. De dire que ces des gens de l’opposition, du Fndc qui sont derrière ces meurtres est invraisemblable. Partout où il y a eu des morts, il y avait des policiers, des militaires, des gendarmes. Qui sont arrêtés, torturés, tués, blessés ? Ces sont des manifestants de l’Opposition, des sympathisants du Fndc. Nul. Il arrive rarement que ce soit des policiers, gendarmes ou militaires”.
En attendant que ce dossier guinéen à la CPI ne soit à une étape supérieure, le gouvernement a d’autres chats à fouetter avec sa nouvelle Constitution, “supposément adoptée lors du double scrutin controversé du 22 mars dernier” selon un analyste politique et que le Barreau de Guinée a qualifié de “faux document” et appelé à “tort Constitution”.
Même parmi des députés de l’Assemblée installée suite à ces élections du 22 mars, il y a des élus qui dénoncent la falsification de la Constitution. Cas par exemple du président de la Géci, Fodé Mohamed Soumah qui s’est confié à guineenews.org, premier site d’informations de Guinée.
Le président de la Géci a constaté “qu’une constitution a été soumise au référendum. En tout cas, je parle du document officiel, portant le sceau du ministre de la Justice. J’ai pris ce document… je l’ai comparé à celui qui a été promulgué. Je puis vous dire qu’à partir de la 5ème page, jusqu’à la fin, sur chaque page, il y a un problème. Il y a des articles qui ont été totalement dénaturés. D’autres dont le sens a été changé. D’autres qui deviennent même incompréhensibles. D’autres encore avec des fautes d’orthographe (…) c’est de la folie de penser qu’une fois qu’une constitution a été soumise au référendum, on peut changer quelques articles, on peut faire des artifices juridiques (…) il n’est pas question que le ministre de la Justice nous fasse gober ce qu’il a dit. C’est-à-dire que la constitution qui a été promulguée est de rigueur. Non. C’est celle qui a été par le peuple qui doit être de rigueur. Et nous entendons poursuivre notre travail d’opposant pour que ces rectifications soient faites, afin que la constitution qui a été votée soit la copie conforme de celle qui doit être promulguée»…