Cette analyse porte sur le principe de « non bis in idem » ou « ne bis in idem » à la lumière des dispositions des articles 2, 341 et 1126 du code de procédure pénale et celles de l’article 68 de la loi 046 relative à la Cour des comptes de Guinée.
La règle de non bis in idem est un principe classique de la procédure pénale selon lequel nul ne peut être poursuivi ou pénalement puni successivement ou parallèlement à raison des mêmes faits. Il désigne de ce fait l’autorité de la chose jugée au pénal sur le pénal qui interdit toute nouvelle poursuite contre la même personne pour les mêmes faits. C’est une règle qui interdit la double incrimination et/ou sanction répondant ainsi à un souci de protection des libertés individuelles de la personne poursuivie.
En outre, il signifie que lorsqu’un même fait matériel, reproché au même prévenu, susceptible de faire l’objet de plusieurs qualifications (cumul idéal d’infraction), que ce fait matériel ne puisse se voir appliquer qu’une seule qualification pénale.
En gros, la règle de non-bis in idem interdit en effet de condamner un individu deux fois pour le même fait.
Toutefois, ce principe ne n’applique pas à la procédure devant la chambre de discipline budgétaire et financière (CDBF) de la Cour des comptes qui inflige des peines d’amende aux coupables de faute de gestion. La CDBF est la chambre répressive de la Cour des comptes. Elle juge les infractions quasi-pénales.
Ainsi, le dernier alinéa des dispositions de l’article 68 de la loi 046 relative à la Cour des comptes prévoient : « Les poursuites devant la Cour des comptes ne font pas obstacle à l’exercice subséquent de l’action pénale et de l’action disciplinaire. »
Ces dispositions donnent droit à la Cour des comptes de poursuivre toute personne présumée coupable de faute de gestion, de gestion de fait en dépit, de toute autre poursuite judiciaire. La peine d’amende qui sera infligée par la Cour des comptes sera différente de celle qui sera prononcée par les juridictions répressives de droit commun.
En réalité cette pratique peut paraître à l’égard de l’Etat guinéen comme étant un enrichissement de trop dès lors que pour la même faute, requalifiée par les lois de la République, la même personne paie deux fois l’amende au Trésor public.
Il convient de conclure que le principe de non bis in idem s’applique en cas de cumule d’amende prononcée par deux chambres différentes de la Cour des comptes (faute gestion et gestion de fait), puisque précisément ces deux amendes ont la même nature et la même vocation mais de bases différentes.
Djibril Magassouba, Magistrat financier, Conseiller référendaire à la Cour des comptes de Guinée