Comme dans plusieurs autres préfectures du pays, les prix d’intrants agricoles ont fortement grimpé à Faranah. Par exemple, un sac de 50 kilogrammes qui se vendait sur place à 250 000, est passé à 450 000 francs guinéens. Quant aux herbicides, le prix est passé de 400 000 à 750.000 francs guinéens par carton. C’est le constat fait par le correspondant de Laguinee.info basé à Faranah.
Les paysans s’inquiètent et se voient déjà obligés de réduire leur capacité de production. Sékou Oularé a été rencontré au marché central de Faranah. Venu de son village qui est Nerekoro, il cherchait des herbicides.
« C’est effectif que les prix d’intrants agricoles ont grimpé. Vers la fin de la campagne précédente, on achetait un litre d’herbicides à 35 000 francs guinéens dans les dépôts agréés. Dans le marché, ça se négociait entre 38 000 et 40 000 francs guinéens par endroit.
Cette année, je voudrais acheter beaucoup d’herbicides mais le marché a changé mon élan parce que j’ai trouvé que le prix est monté en flèche de 65 000 à 70 000 francs guinéens. Si le prix d’herbicides monte de la sorte, ça peut nous impacter négativement en termes de production et on sera fatigué. Cette montée des prix permettra aux producteurs de faire recours à la traction animale dont le coût journalier est de 60 000. Donc, ceux qui avaient l’habitude d’utiliser 4 litres seront en difficulté de trouver cette année les frais de ces 4 litres », a-t-il témoigné.
L’envolée des prix d’intrants agricoles en Guinée s’explique par la cherté du transport entre le pays fournisseur et Conakry. En tout cas c’est ce qui ressort des dires des revendeurs de Faranah.
« Les opérateurs nous ont dit, c’est parce que ce sont eux qui nous approvisionnent à partir de Conakry, que dans leur commande, le coût du transport de ces intrants agricoles de la Chine à Conakry a beaucoup augmenté. Donc ils sont obligés de suivre le prix du marché surtout le coût du transport de la Chine à la Guinée. Certains opérateurs disent que le transport a triplé. Donc avec ça, ils sont obligés d’augmenter le prix. Nous qui partons chercher auprès d’eux à Conakry, le prix auquel ils nous donnent, on fait aussi des dépenses, des charges à ça et on calcule le prix de revient. C’est ce qui nous amène à vendre à un prix pour ne pas aussi perdre. Ce n’est pas la faute des commerçants d’ici ni de ceux de Conakry. C’est dû à la conjoncture mondiale. L’herbicide était subventionné à un moment par le gouvernement Alpha. La subvention avait cessé avec les herbicides mais avec les engrais, ça continuait. Mais là aussi le coût continuait toujours à grimper. Les prix de l’engrais ont varié trois fois pendant la campagne 2021 passée. Au premier arrivage, le prix était à 150 000 francs guinéens. Au deuxième arrivage, le prix a augmenté de 200 000 francs guinéens et enfin de campagne la quantité qui est venue, c’était vendu à 250 000 francs guinéens. Et ça c’est le produit subventionné. Maintenant, les privés qui vont acheter l’engrais sans subvention. Eux, ils vendent de 400 000 à 450 000 francs guinéens parce que le prix est très élevé. L’année dernière on prenait le carton d’herbicides entre 380 000 francs guinéens à 400 000 francs guinéens chez certains. Mais cette année-là, le carton à Conakry dans les magasins avec les grossistes, ça varie entre 720 000 et 750 000 francs guinéens. Donc, avec ce coût, ceux qui vont chercher ça aussi de Conakry pour ici (Faranah), il y a des frais liés au transport, à la manutention. Tout cela, les gens sont obligés d’appliquer un prix ici qui leur permet d’avoir quelque chose », a expliqué Ansoumane N’Diaye, revendeur d’intrants agricoles à Faranah.
Dans un périmètre de maraîcher aménagé, un étudiant s’est prêté au micro de notre correspondant. D’abord il a abordé l’envolée des prix d’intrants qui prévaut à Faranah. Ensuite, il a invité le gouvernement à y faire face.
« C’est une réalité. Les prix des engrais ont grimpé ces derniers moments. Les temps précédents, on achetait l’engrais NPK et l’urée à 9000 francs guinéens le kilogramme. De nos jours, c’est de 10000 à 12000 francs guinéens soit 3000 francs guinéens de hausse. Cette hausse peut avoir plusieurs impacts dont le principal est sur la production. Quand les moyens de production sont en hausse, ça va jouer sur la production parce qu’on ne pourra pas acheter tout ce qui est recommandé. Ça va jouer sur le rendement du producteur parce qu’on ne peut pas acheter la dose normale pour nos plantes. Sachant que l’agriculture est la base du développement d’un pays, le gouvernement doit s’impliquer dans ce secteur en rendant ces engrais accessibles à tous les producteurs, subventionner les producteurs qui n’ont pas la possibilité d’acheter ces engrais », a dit Fodé Cissé, étudiant.
Selon la Directrice préfectorale de l’agriculture de Faranah qui été jointe au téléphone, les paysans de la Guinée ne sont pas les seuls à être confrontés à la pénurie d’intrants et à la hausse des prix de ces deux produits. Il s’agit plutôt d’une conjoncture mondiale provoquée en partie, a-t-elle poursuivi, par la guerre qui oppose actuellement la Russie à l’Ukraine.
« Ce qu’ils (paysans) ne suivent pas ce qui se dit avec ce qui se passe dans les autres pays qui nous donnent l’engrais. On n’en trouve même pas. Est-ce qu’ils ont même reçu d’abord ? L’engrais est-il arrivé à Faranah ? S’agissant des intrants vendus par les commerçants privés au marché, c’est cher. L’Etat a même des difficultés pour la commande. Vous même (journalistes) vous savez ce qui se passe dans les autres pays. Avec la guerre entre la Russie et l’Ukraine, ce sont eux qui fournissent de l’engrais. Actuellement il n’y en a pas. Difficilement, le ministre s’est battu pour trouver une quantité. J’ai suivi à la télé que bientôt, ils vont commencer la distribution mais ça c’est pas encore fait. C’est ce qu’il (journaliste) faut leur (producteurs) dire. Pour beaucoup d’observateurs, c’est la guerre en Ukraine menée par la Russie qui vient déstabiliser encore un peu les cours des intrants déjà partis en hausse avant ce conflit. Les agriculteurs locaux à Faranah accusent le coup, mais s’inquiètent de l’avenir, encore incertains et demandent une subvention de l’Etat pour relever le défi de l’autosuffisance alimentaire à l’intérieur du pays », a laissé entendre Fanta Diané, Directrice préfectorale de l’agriculture de Faranah.
De Faranah, Ibrahima Oularé pour Laguinee.info
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