La colère monte dans les rangs de la diaspora guinéenne, notamment celle originaire de la région forestière. Dans une lettre officielle adressée aux plus hautes autorités du pays, le Conseil Supérieur de la Diaspora Forestière (CSDF) dénonce vertement la non-application de la suspension de la transhumance annoncée par le gouvernement en janvier dernier.
Le 23 janvier 2025, le gouvernement de la transition guinéenne annonçait, dans un communiqué salué comme courageux et historique, la suspension de la transhumance sur toute l’étendue du territoire national jusqu’en mars 2026. Cette décision était censée protéger les terres agricoles, limiter les conflits récurrents entre éleveurs et agriculteurs, et garantir la paix sociale dans les zones rurales, en particulier en Guinée forestière, régulièrement touchée par des affrontements meurtriers.
Mais près de six mois plus tard, le constat dressé par le CSDF est sans appel : les troupeaux étrangers, notamment les zébus maliens, continuent de dévaster les terres agricoles avec la même impunité. La date butoir du 2 mai 2025, fixée par les autorités guinéennes pour leur retrait, n’a, selon la diaspora, été suivie d’aucune action concrète.
« Les textes existent, les déclarations aussi. Ce qui manque, c’est la volonté politique de les appliquer », fulmine le président du Conseil Supérieur de la Diaspora Forestière, M. Édouard Haba, dans une correspondance transmise depuis Washington, DC.
Une indignation qui prend racine dans les champs dévastés
Le ton, bien que républicain, ne masque ni la frustration ni l’exaspération des membres du CSDF. La transhumance, dans sa forme actuelle, n’est plus perçue comme un simple déplacement saisonnier de bétail, mais comme une menace directe aux droits fonciers, à la sécurité des paysans et à l’équilibre environnemental.
« Nous recevons chaque jour des témoignages révoltants de familles chassées de leurs champs, d’agriculteurs emprisonnés pour avoir osé protéger leurs terres, d’enfants privés de pain par la destruction de leurs récoltes », écrit le Bureau exécutif mondial du CSDF.
Silence coupable ou incompétence ?
Derrière les formules diplomatiques, le message est limpide : l’inaction des autorités vaut complicité. En ne faisant pas respecter une mesure qu’elles ont elles-mêmes annoncée, les institutions concernées – Présidence, Primature, Défense, Administration du territoire, Sécurité, Agriculture et Environnement, envoient un signal d’abandon aux populations rurales déjà fragilisées.
« Il ne s’agit plus d’un simple dossier administratif, mais d’un enjeu humanitaire majeur », rappelle la diaspora, évoquant la dégradation des terres, les tensions intercommunautaires, et la montée de l’insécurité dans les campacampagnes
Le CSDF appelle à l’action immédiate
Le Conseil Supérieur de la Diaspora Forestière ne se contente pas de dénoncer : il propose une collaboration technique, un appui en médiation, et la mobilisation de ses compétences à l’international pour accompagner l’État. Mais il exige d’abord un geste fort : la libération immédiate des paysans emprisonnés pour avoir résisté à l’occupation de leurs terres.
« Il y va de la crédibilité de l’État, de la restauration de la dignité paysanne, et de la stabilité du pays tout entier. La paix sociale ne s’improvise pas, elle se protège par des actes », conclut la lettre.
Laguinee.info