Entre files interminables, paiements illicites et désorganisation, les habitants de Kankan peinent à accéder à leurs actes d’état civil malgré l’annonce officielle de leur gratuité.
Depuis le lancement du recensement à vocation d’état civil dans tout le pays, la commune urbaine de Kankan est prise d’assaut. L’annonce de la gratuité des documents administratifs, faite par les autorités, devait simplifier la vie des citoyens. Sur le terrain, la réalité est tout autre : les usagers dénoncent extorsion, confusion et abus.
Promesse d’État, réalité contrariée
Moussa Moïse Bérété, jeune diplômé, a passé la matinée à la mairie pour obtenir un extrait de naissance biométrique. Arrivé dès 7h, il n’a pu entamer les démarches qu’après 9h, sur instruction d’une agente municipale.
« Elle nous a dit que ceux qui ont un jugement supplétif doivent se rendre là où ils l’ont obtenu, payer 60 000 francs guinéens, et ce, en cachette », témoigne-t-il, déconcerté.
« Je croyais que les papiers étaient gratuits. Mais ici, ce n’est pas le cas. Si l’État prend une décision, il faut qu’elle soit respectée. Beaucoup payent alors qu’ils n’ont même pas les moyens. »
Même constat chez Fodé Mara, un autre jeune venu chercher le précieux sésame pour se faire recenser.
« On nous a dit que c’est gratuit, mais ce n’est pas ce qu’on voit. On paie pour avoir un extrait de naissance. On demande au président de faire respecter sa décision », lance-t-il, visiblement agacé.
Entre justice et mairie, un labyrinthe administratif
Mamadi Traoré, conducteur de taxi-moto, fait lui aussi les frais d’un système qu’il juge incohérent.
« Cela fait une semaine que je cherche ce papier. On me fait aller de la mairie à la justice, puis retour à la mairie. Personne ne m’indique clairement où aller. Et pendant ce temps, je ne peux pas travailler », confie-t-il.
Il estime que l’État devrait envoyer des superviseurs pour vérifier si les consignes sont effectivement appliquées sur le terrain.
Les autorités locales démentent
Contacté par laguinee.info, M. Savane, officier de l’état civil de Kankan, assure que tous les documents sont bel et bien délivrés gratuitement, conformément aux instructions du président de la délégation spéciale, Arafan Moussa Koulibaly.
Pourtant, les témoignages recueillis dressent un tout autre tableau. La gratuité décrétée semble peiner à s’imposer face à des pratiques bien ancrées. Une situation qui, si elle perdure, risque de freiner la réussite du recensement et de nourrir davantage la méfiance des citoyens envers l’administration.
De Kankan, Karifa Kansan Doumbouya, pour Laguinee.info