samedi, mai 3, 2025
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AGOA : le rêve américain se transforme en cauchemar pour l’Afrique australe

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L’AGOA vacille. Et avec lui, c’est toute une partie de l’économie africaine qui tremble. Maurice, Madagascar, le Lesotho et surtout l’Afrique du Sud, moteurs ou satellites de l’accord commercial préféré de Washington avec l’Afrique, sont en train d’en faire les frais. La suspension partielle de l’African Growth and Opportunity Act, dans un climat d’hostilité croissante impulsé par l’administration américaine, pourrait bien précipiter des milliers d’emplois dans l’abîme.

Un textile sans fil de secours

« Désastreux ». Le mot n’est pas trop fort pour qualifier les conséquences de cette décision sur le Lesotho. Ce petit royaume montagneux, longtemps modèle de réussite de l’AGOA, voit son économie vaciller. Selon Richard Morrow, analyste à la Brenthurst Foundation cité par l’AFP, l’industrie textile représente jusqu’à 10 % du revenu national brut. Or, depuis la semaine dernière, les jeans et vêtements made in Lesotho sont taxés à 10 % à l’entrée des États-Unis, tarif « provisoire » le temps d’une suspension de 90 jours. Un répit trompeur : passé ce délai, ce sont 50 % de droits de douane qui pourraient être appliqués. Autant dire la mort annoncée d’un secteur entier.

L’Afrique du Sud en première ligne

Mais le choc est peut-être encore plus brutal au sud du continent. Dans la première puissance industrielle d’Afrique, l’automobile est au bord du carambolage. Mercedes-Benz, BMW, Ford… sept constructeurs bénéficiaient jusqu’ici d’un accès sans taxes au marché américain. Fini. Désormais, chaque véhicule sud-africain expédié aux États-Unis devra s’acquitter d’une taxe de 25 %.

Selon l’AFP 25 000 voitures particulières exportées chaque année, soit 6,5 % du marché de l’automobile sud-africain, sont directement concernées. Et avec elles, un empire industriel : 86 000 emplois directs menacés, 125 000 en incluant les sous-traitants, selon l’organisation patronale Naamsa. « Ce sera dévastateur pour l’Afrique du Sud », alerte Alex Vines de Chatham House. Le pays connaît déjà un taux de chômage de 32 %, l’un des plus élevés au monde.

Vanille sous tension, oranges amères

Madagascar n’est pas en reste. Premier producteur mondial de vanille, l’île bénéficiait elle aussi de l’AGOA pour exporter ses précieuses gousses sans taxes. Officiellement, « l’accord s’applique toujours », selon son ministre du Commerce. Mais la confusion règne. Le Lesotho, le Botswana (37 % de droits), la Namibie (21 %), le Zimbabwe (18 %) et même les exportateurs d’agrumes sud-africains voient s’abattre des surtaxes qui menacent de rendre leurs produits invendables.

Une claque politique autant qu’économique

Dans les couloirs de Washington, cette décision a des relents de règlement de comptes politique. L’Afrique du Sud, dans le collimateur de Donald Trump pour son traitement des Afrikaners, paie-t-elle sa politique étrangère jugée « trop distante » de celle de l’oncle Sam ? L’AGOA, au lieu d’être un outil de partenariat gagnant-gagnant, devient une arme de chantage économique.

La fin d’un mirage ?

Renouveler l’AGOA, qui expire en septembre ? « Illusoire », tranche Alex Vines. En coulisses, les espoirs s’étiolent, les bilans s’aigrissent. En façade, c’est le silence prudent des grands industriels, comme Mercedes-Benz South Africa. La guerre commerciale est lancée, et l’Afrique, une fois de plus, n’est ni consultée, ni protégée.

Dans l’arène mondiale, les États-Unis renversent la table. Mais ce sont les économies fragiles d’Afrique australe qui risquent de se retrouver dessous.

 

Laguinee.info

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