Le procès de Bangaly Traoré, présumé assassin d’Adama Konaté, s’est ouvert ce lundi matin au Tribunal de première instance de Kankan, délocalisé pour l’occasion à la Cour d’appel. Dans une salle d’audience pleine à craquer et sous haute sécurité, le prévenu a reconnu, devant le juge, être l’auteur du meurtre, détaillant avec précision les circonstances de l’acte et les motivations qui l’auraient poussé à passer à l’irréparable.
Un passé trouble et une relation conflictuelle
Dès l’entame de l’audience, le juge interroge l’accusé sur son identité :
« Bonjour, comment tu t’appelles ? »
« Je m’appelle Bangaly Traoré », répond calmement l’homme de 50 ans. Originaire de Boriah, chauffeur de profession, il affirme être marié à deux femmes et père de sept enfants.
À la question de savoir s’il a déjà eu affaire à la justice, il précise : « Non, jamais à la justice, mais trois fois à la gendarmerie avec la défunte Adama Konaté. »
Il évoque alors des « incompréhensions » dans leur relation, et notamment une première altercation survenue lorsqu’Adama souhaitait se marier à un autre homme :
« J’ai décroché le téléphone quand ce monsieur appelait, je lui ai dit de la laisser. Ensuite, elle a rompu avec lui, mais je l’ai frappée ce jour-là. Elle a eu des blessures au front. »
Il affirme que cette affaire avait été réglée à l’amiable à la gendarmerie. Les deux autres incidents, également violents, ont aussi été dissimulés à la famille de la victime, notamment à son frère, « très exigeant », dit-il.
Un assassinat prémédité selon ses propres aveux
À la barre, Bangaly Traoré ne nie rien. Il confesse avoir planifié le meurtre : « J’ai acheté un couteau et de l’herbicide pour tuer Adama, et me donner la mort ensuite. »
Il explique que c’est après une ultime dispute que tout a basculé. La victime lui aurait annoncé qu’elle ne voulait plus de lui, car un autre homme, venu de la Mecque, s’apprêtait à la doter.
Il relate les faits : « Elle m’a dit que je ne pouvais plus la voir, car son fils allait arriver. Je suis allé au marché, j’ai acheté un couteau à 20.000 GNF, puis un herbicide. Ensuite, je suis allé à sa boutique. Je lui ai dit que j’allais en finir avec elle. Je l’ai poignardée. Puis j’ai bu le poison. »
Le juge, surpris, lui demande pourquoi il n’a pas utilisé le couteau contre lui-même. Bangaly répond sans détour :
« J’ai pris le poison pour me laisser un peu de temps avant ma mort, pour expliquer aux gens ce qui s’est passé et pourquoi je l’ai fait. Mais si j’avais su que ce poison ne tue pas, j’aurais utilisé le couteau. Il ne m’a même pas donné la diarrhée. »
Une conscience tardive et des regrets
Le juge poursuit :« Quand as-tu pris conscience de ton acte ? »
L’accusé répond : « C’est quand je me suis réveillé à l’hôpital, avec un tuyau dans le nez, pour extraire le poison. Je ne voulais même pas qu’on me soigne. J’ai compris que c’était fini pour moi. Je me demandais pourquoi je l’avais fait, qu’est-ce qui m’avait mis dans ça. »
Il éclate alors en larmes :« J’ai tué Adama. C’est ça. »
Bangaly insiste par ailleurs qu’il n’était ni ivre, ni drogué au moment des faits :« Moi, je ne bois pas, je ne fume pas, je ne prends rien. »
Un procès sous tension, une population mobilisée
Dès l’ouverture de l’audience à 9h15, les abords de la Cour d’appel de Kankan étaient étroitement encadrés par les forces de sécurité. L’affaire, largement relayée sur les réseaux sociaux, suscite une vive émotion dans la ville. La salle d’audience était comble, reflet d’une population en quête de vérité et de justice.
L’audience reprendra dans les prochains jours pour l’examen des preuves matérielles et l’audition des témoins. D’ores et déjà, les aveux circonstanciés de Bangaly Traoré pèsent lourd dans le dossier.
Laguinee.info