Le décret présidentiel accordant la grâce à l’ancien chef de la junte Moussa Dadis Camara continue d’alimenter les débats en Guinée. Si certains contestent la légalité de cette décision, le juriste Kalil Camara assure que Mamadi Doumbouya est dans son bon droit. « La constitution guinéenne du 10 mai 2010 et celle de 2020 (dernière) interdisaient l’exercice du droit de grâce au président intérimaire qui pouvait être président de la transition. Cette constitution réservait exclusivement l’exercice du droit de grâce au président élu », explique-t-il.
Une compétence jadis réservée aux présidents élus
Les constitutions guinéennes de 2010 et 2020 ne permettaient pas aux présidents de transition d’exercer le droit de grâce. Seuls les présidents élus pouvaient en faire usage, comme le stipulaient les articles 170 du Code pénal et 1189 du Code de procédure pénale. « Partant de ces constitutions et des articles mentionnés, qui utilisent le terme ‘Président de la République’, il était impossible pour un président de la transition d’exercer le droit de grâce« , précise Kalil Camara.
Une Charte qui change la donne
Depuis 2021, la Guinée n’a plus de constitution. La Charte de la transition sert de référence juridique et l’article 43 de ce texte est clair : « Le président de la transition exerce le droit de grâce et confère les décorations de la République. » Kalil Camara confirme : « Par ailleurs, depuis 2021, la constitution a été abrogée. Il y a une charte qui régit l’exercice des pouvoirs publics. Cette charte fait office de constitution et dispose sans équivoque que le président de la transition est en bon droit d’exercer le droit de grâce. »
Une décision aux enjeux multiples
Au-delà de l’aspect juridique, cette mesure pose la question de ses conséquences politiques et judiciaires. Moussa Dadis Camara, incarcéré dans le cadre du procès des massacres du 28 septembre 2009, bénéficie d’une grâce qui pourrait raviver le débat sur la justice transitionnelle en Guinée.
Ce geste du chef de la transition renforcera-t-il son autorité ou suscitera-t-il davantage d’interrogations sur la gestion des affaires judiciaires ? Le pays attend maintenant les réactions des acteurs politiques et de la société civile.
Laguinee.info