Adoptée en janvier 2024, la loi L/2024/002/CNT sur la réglementation de la publicité en Guinée s’impose désormais comme le cadre légal de diffusion des messages publicitaires. Mais si elle vise à structurer un secteur en pleine mutation, certaines de ses dispositions suscitent déjà de vives réactions, notamment dans le monde des médias.
L’article 58 en est un exemple frappant. Il interdit purement et simplement aux journalistes, animateurs et présentateurs audiovisuels d’utiliser leur image ou leur voix à des fins publicitaires. Une mesure qui vient rompre avec une pratique bien ancrée depuis la libéralisation des ondes en Guinée.
Un coup dur pour les professionnels des médias
Depuis plusieurs années, de nombreux journalistes et animateurs se sont imposés comme des figures incontournables de la publicité, associant leur notoriété à des campagnes promotionnelles pour des marques ou des institutions. Désormais, cette source de revenus leur est interdite.
Si l’objectif affiché est d’éviter toute confusion entre information et publicité, cette disposition pose une question cruciale : pourquoi priver un professionnel des médias du droit d’exploiter son image et sa voix en dehors de ses fonctions journalistiques ?
D’autant plus que la même loi définit clairement les acteurs habilités à exercer dans le domaine publicitaire : agences-conseils, régies, éditeurs et courtiers en publicité. Or, cette restriction laisse entendre que les professionnels des médias ne peuvent être ni promoteurs ni acteurs d’une publicité, même lorsqu’ils n’agissent pas en qualité de journalistes.
Un flou juridique aux conséquences lourdes
Outre l’interdiction faite aux journalistes, la loi impose des sanctions sévères contre l’exercice illégal de la profession publicitaire. Une amende comprise entre 100 et 150 millions de francs guinéens est prévue pour les contrevenants. Mais comment distinguer précisément une publicité « légale » d’une promotion déguisée ?
Autre problème majeur : le manque de vulgarisation du texte. Nombreux sont les professionnels et même les agences de communication qui ignorent encore son contenu. Ce déficit d’information risque d’entraîner une multiplication involontaire des infractions.
Réglementation ou musellement ?
Si l’intention de structurer le secteur publicitaire est légitime, la mise à l’écart forcée des professionnels des médias soulève une inquiétude : cherche-t-on à professionnaliser la publicité ou à restreindre la liberté d’expression commerciale des journalistes ?
En attendant une éventuelle clarification des autorités, une chose est sûre : cette loi, en voulant encadrer la publicité, pourrait bien changer en profondeur l’écosystème médiatique guinéen. Reste à savoir si les concernés accepteront sans broncher cette mise à l’écart forcée.
Laguinee.info