L’ancien président gambien Yahya Jammeh refait surface. Depuis son exil en Guinée équatoriale, où il s’est réfugié en 2017 après avoir été contraint de quitter le pouvoir, l’ex-homme fort de Banjul a annoncé son intention de reprendre les rênes de son parti, l’Alliance patriotique pour la réorientation et la construction (APRC).

Une déclaration fracassante faite dans un message audio adressé à ses partisans, dans laquelle il proclame : « J’ai décidé aujourd’hui de reprendre la tête de mon parti et de ne plus le confier à personne. […] Par la grâce d’Allah, je reviens. »

Si Yahya Jammeh laisse planer le doute sur un éventuel retour en Gambie, son ton martial ne laisse guère place à l’interprétation. À ceux qui évoquent la perspective de son incarcération, il répond avec défiance : « Que ceux qui menacent de me mettre en prison attendent que j’arrive. Le jour où il faudra rendre des comptes approche, et ce jour-là, on réglera les comptes. » Une menace à peine voilée qui ne manquera pas d’alimenter l’inquiétude dans les cercles du pouvoir actuel.

Une ombre judiciaire persistante

Mais l’ancien autocrate ne pourra ignorer la réalité judiciaire qui l’attend. En 2022, le gouvernement gambien a adopté les recommandations d’une commission d’enquête ayant mis en lumière les crimes commis sous son régime, entre 1994 et 2017. Parmi ces recommandations figure la poursuite de 70 personnes, dont Yahya Jammeh lui-même, pour une série de violations graves des droits humains : exécutions extrajudiciaires, arrestations arbitraires, disparitions forcées et même accusations de viol.

Des ONG comme Human Rights Watch rappellent régulièrement l’ampleur des abus sous son règne, évoquant notamment l’exécution de 59 migrants ouest-africains en 2005. La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a d’ailleurs soutenu la mise en place d’un tribunal spécial pour juger les crimes du régime Jammeh, faisant planer sur lui l’épée de Damoclès d’une éventuelle extradition.

Un retour possible ou un simple coup de bluff ?

Si Yahya Jammeh reste pour l’instant en exil, ses déclarations soulèvent de nombreuses interrogations. Cherche-t-il à tester les eaux avant une tentative de retour sur la scène politique gambienne ? Ses partisans, encore nombreux malgré les accusations accablantes, pourraient voir en lui un recours face aux difficultés socio-économiques du pays. Toutefois, le pouvoir en place ne semble pas prêt à lui ouvrir la moindre brèche.

En attendant, l’ancien président entretient le suspense et continue de hanter la politique gambienne tel un fantôme du passé, entre nostalgie et crainte. Une chose est sûre : la partie est loin d’être terminée.

Laguinee.info