Emmanuel Macron, dans son costume impeccable et son ton de professeur, s’est encore adressé au monde, mais surtout à la France. Devant ses ambassadeurs, il a parlé de l’Afrique, de ce continent qu’il ne cesse de vouloir comprendre sans jamais l’écouter. Cette fois, il fallait expliquer le départ des soldats français. Mais chez Macron, on ne parle pas de départ sous la contrainte, non, on parle de « réorganisation », d’ »assumer ensemble ». Comme si, en Afrique, les adieux pouvaient encore être maquillés en gestes nobles.
« Dans bien de ces pays, on ne voulait pas enlever l’armée française« , dit-il. Quelle audace ! En disant cela, il feint d’ignorer les rues pleines de manifestants, ces foules qui scandaient des slogans contre la présence française. Les drapeaux brûlés, les regards enflammés, tout cela ? Des détails. Macron préfère raconter son Afrique, celle qu’il contrôle encore dans ses discours, même si elle lui échappe dans la réalité.
Et puis, il y a cette phrase : « Comme on est très polis, on leur a laissé la primauté de l’annonce. » Quelle politesse, en effet, que de laisser l’autre dire « Sortez ! » avant de lui répondre « C’est ce qu’on allait faire. » Politesse ou arrogance ? Dans cette élégance feinte, il y a surtout la peur de l’humiliation. Car l’Afrique, cette vieille alliée silencieuse, n’est plus docile. Elle crie, elle exige, elle impose.
Fatou Diome dirait que l’Afrique n’est ni un théâtre pour les ambitions européennes, ni un tableau à redessiner selon les caprices des puissants. Elle est vivante, révoltée, debout. Macron, lui, veut écrire l’histoire comme s’il en était l’auteur, mais l’Afrique, elle, en est la narratrice. Et dans cette narration, les soldats français ne sont pas partis en héros, mais bien poussés vers la sortie.
Macron peut raconter ce qu’il veut à ses ambassadeurs, mais en Afrique, on sait reconnaître le vrai du faux. Ce départ, qu’il tente de peindre en choix stratégique, restera pour beaucoup l’aveu d’un échec. Et comme Fatou Diome l’écrirait si bien : « L’Afrique n’est pas une terre qu’on quitte, c’est une mémoire qui ne pardonne pas l’arrogance. »
Laguinee.info