En cette nouvelle année 2025, le président Mamadi Doumbouya a, une fois de plus, promis des élections générales pour « parachever le retour à l’ordre constitutionnel. » Ce discours, qui se veut porteur d’espoir et de stabilité, ne manque cependant pas de soulever des interrogations légitimes sur la sincérité de cet engagement. Cette promesse, répétée depuis 2023, n’a toujours pas été tenue. Alors, est-ce une volonté réelle ou une stratégie habilement calculée pour préserver le statu quo ?
Les leçons de 2023 : entre promesses et inaction
En décembre 2023, le président Doumbouya avait tenu des propos similaires, affirmant que l’année 2024 serait une étape clé vers le retour à l’ordre constitutionnel. Mais aucune avancée concrète n’a été enregistrée. Les raisons avancées, notamment l’incendie du dépôt d’hydrocarbures, bien que graves, paraissent insuffisantes pour justifier une telle inertie. D’autant plus que ces incidents n’ont pas empêché la junte de poursuivre ses priorités, comme le renforcement de l’appareil sécuritaire.
Un discours qui interroge
Le ton rassembleur du discours de 2025 laisse transparaître une tentative de calmer les ardeurs d’une opposition de plus en plus critique et d’une communauté internationale qui surveille de près la transition guinéenne. En multipliant les appels à l’unité, à la solidarité et au patriotisme, Mamadi Doumbouya semble chercher à désamorcer les tensions politiques, mais à quel prix ?
Certains observateurs voient dans ces déclarations une stratégie politique visant à :
1. Gagner du temps : En annonçant une « année électorale cruciale, » le président repousse implicitement les attentes immédiates, donnant à la junte plus de marge pour consolider son pouvoir.
2. Amadouer l’opposition : L’appel aux acteurs politiques à « préserver les intérêts supérieurs du peuple » peut être perçu comme une invitation voilée à éviter les manifestations, en échange d’une promesse encore vague.
3. Tromper la CEDEAO et la communauté internationale : En renouvelant ses engagements, la junte espère sans doute éviter de nouvelles sanctions tout en continuant à gouverner sans véritable opposition.
Un pari risqué pour la stabilité
Si cette promesse venait à être trahie une fois de plus, les conséquences pourraient être graves. Les Guinéens, déjà éprouvés par des décennies de désillusions politiques, pourraient perdre toute confiance en leurs dirigeants. L’opposition, renforcée par la lassitude populaire, pourrait également intensifier ses mobilisations, plongeant le pays dans une instabilité politique majeure.
De plus, la CEDEAO, qui avait déjà exprimé des doutes sur la sincérité de la junte, pourrait durcir ses sanctions. Cela accentuerait les pressions économiques et diplomatiques sur un pays qui peine déjà à relancer son économie.
Vers un retour à l’ordre constitutionnel ?
Pour que cette année électorale annoncée soit crédible, plusieurs mesures doivent être prises immédiatement :
Un calendrier clair : La publication d’un chronogramme détaillé des élections est essentielle pour rassurer l’opinion publique et les partenaires internationaux.
Des garanties institutionnelles : La mise en place d’organes électoraux véritablement indépendants serait un signe tangible de la volonté de la junte de céder le pouvoir.
Un dialogue inclusif : Associer l’ensemble des forces vives du pays à ce processus pourrait réduire les tensions et garantir un climat de sérénité.
Promesse ou une autre marque de diversion ?
Mamadi Doumbouya joue une carte délicate. Si ses intentions sont sincères, il devra poser des actes concrets pour convaincre une population et une communauté internationale de plus en plus sceptiques. En revanche, si cette promesse n’est qu’un écran de fumée, le risque est grand de voir le pays sombrer dans une crise politique et sociale encore plus profonde.
L’année 2025 sera donc déterminante. Mais une chose est certaine : les Guinéens n’ont plus le luxe d’attendre.
Laguinee.info