Lors de sa visite à Djibouti pour les fêtes de fin d’année, Emmanuel Macron a annoncé une transformation majeure de la base militaire française à Djibouti. Cette base, la 188, ne sera plus seulement un poste avancé dans l’océan Indien, mais deviendra un « point de projection » pour des missions en Afrique. Une décision qui arrive dans un contexte de recul historique des forces françaises sur le continent.
Ce repositionnement s’impose après une série de revers en Afrique de l’Ouest, où la France a été contrainte de plier bagage face à des régimes de transition de plus en plus hostiles à sa présence militaire. La base de Djibouti, isolée géographiquement mais stratégiquement cruciale, devient donc l’exception qui confirme la règle : le désengagement progressif de Paris sur le continent africain.
Un cadeau de Noël ou un lot de consolation ?
Lors d’un dîner de Noël avec les 1.500 soldats stationnés à Djibouti, le président français a vanté l’importance de ce petit pays d’Afrique de l’Est, situé au carrefour du commerce mondial. Bab-el-Mandeb, la porte entre la mer Rouge et l’océan Indien, capte environ 10 % du commerce maritime mondial, une position stratégique que Paris ne semble pas prêt à abandonner.
Mais ne nous y trompons pas. Derrière les sourires présidentiels et les effluves festives, l’annonce a tout d’une tentative de sauver la face. Réorienter une base historiquement tournée vers l’Indo-Pacifique pour y inclure des missions africaines ressemble plus à un pansement sur une blessure profonde qu’à une réelle réinvention stratégique.
Djibouti : Une singularité parmi les déceptions
Emmanuel Macron a tenu à souligner que Djibouti bénéficie d’un statut particulier. Mais pourquoi ce soudain intérêt pour un pays souvent relégué au second plan dans les priorités géopolitiques françaises ? La réponse est simple : il n’y a plus beaucoup d’options.
Les bases du Sahel ont fermé les unes après les autres. Le sentiment anti-français grandit sur tout le continent, et Paris peine à trouver des relais d’influence. Dans ce contexte, Djibouti, avec son alliance durable et sa position stratégique, apparaît comme la dernière pièce d’un échiquier où la France joue désormais sur la défensive.
Une évolution ou une illusion ?
Selon Macron, cette base devra désormais se préparer à des missions africaines. Mais une question s’impose : quelles missions et dans quel but ? La réorientation annoncée masque mal un changement de paradigme : la France est passée d’un acteur central de la sécurité africaine à un partenaire périphérique en quête de nouvelles justifications pour maintenir un pied sur le continent.
Les défis sont immenses. Pourra-t-on coordonner efficacement des interventions à partir d’un point aussi éloigné des principaux foyers de crise ? Ce « point de projection » sera-t-il véritablement opérationnel ou servira-t-il surtout d’écran à une influence déclinante ?
Une stratégie en sursis
La base 188 de Djibouti est aujourd’hui le symbole d’une présence militaire française qui tente de se réinventer. Mais derrière les discours et les promesses, il est clair que ce repositionnement est aussi une reconnaissance des limites de la stratégie française en Afrique.
Dans un monde où les équilibres se redéfinissent à une vitesse vertigineuse, la question demeure : Djibouti sera-t-elle la planche de salut d’une France militaire en quête de pertinence, ou le dernier bastion avant un désengagement total du continent ?
Laguinee.info