Depuis trois ans, le « Festival sur le Milo », organisé par Guinée Culture, anime la vie culturelle de Kankan. À l’origine, cet événement visait à célébrer le patrimoine mandingue tout en sensibilisant à la sauvegarde du fleuve Milo. Mais aujourd’hui, les habitants se demandent si ces festivités ont un impact réel sur la préservation de ce cours d’eau, dont l’état ne cesse de se dégrader.
Une fête, mais pour quel résultat ?
Djoumé Sacko, journaliste et activiste à Kankan, ne mâche pas ses mots. « C’est une bonne initiative, mais très malheureusement j’ai constaté que l’on accorde beaucoup plus d’intérêt aux côtés festifs plutôt qu’à sa vocation parce que l’idée c’est de sauver le fleuve Milo et ses affluents. Par ailleurs, regardez un peu la mangrove, vous ne constatez pas de reboisement le long de la côte. Il n’y a rien de concret sur le terrain. Donc à date, moi, je dirai qu’il n’y a aucune action concrète pour sauver le fleuve. »
Le constat est sans appel : l’objectif environnemental semble relégué au second plan, transformant le festival en un simple événement de divertissement.
Un slogan sans substance ?
Alhassane Dialawasa Kanté, jeune activiste, partage cette critique. Selon lui, les promesses restent des paroles en l’air. « Pour le moment, s’il y en a, nous n’avons pas encore vu. En tout cas, nous avons appris qu’il y a des projets de reboisement et cette année, ils ont assaini une partie en enlevant des ordures sur une zone proche du fleuve. Cette fois-ci, le festival n’est pas fait pour sauver le fleuve Milo, c’est leur slogan. Mais comme le Milo est un patrimoine, ils ont utilisé le nom. Sinon, à part ça, il n’y a pas trop d’impact positif sur le fleuve. »
Ces propos traduisent un scepticisme largement partagé par de nombreux habitants, qui ne voient toujours pas les effets tangibles des initiatives annoncées.
Des premières actions… mais insuffisantes
Pour Mohamed Lamine Kaba, chef du quartier de Banakoroda, des efforts commencent néanmoins à émerger. « Le festival a un impact sur le fleuve puisque c’est la troisième année déjà, et les deux dernières années étaient basées sur la sensibilisation de la population pour qu’elle protège le fleuve. Cette année, ils ont pris l’initiative de passer à l’action. Aujourd’hui même, ils ont commencé à enlever les tas d’ordures qui sont au bord du fleuve. Ils nous ont offert une bicyclette et dix brouettes pour faciliter le ramassage des ordures. Ils ont beaucoup de projets cette année comme faire le reboisement et l’aménagement du fleuve. »
Cependant, ces mesures restent modestes face à l’ampleur des défis environnementaux.
Une remise en question nécessaire
Pour Djoumé Sacko, il est urgent que les organisateurs revoient leurs priorités. « Il faut revenir sur l’objectif primaire, qui est la protection et la sauvegarde du Milo, en faisant un état des lieux après ces années d’activités. Sauver le Milo, c’est sauver plusieurs êtres vivants. »
Le message est clair : le temps des discours doit laisser place à des actions concrètes et mesurables. Si le fleuve Milo continue de s’enfoncer dans l’abandon, c’est tout un écosystème et une part de l’identité culturelle de Kankan qui sont en péril.
De Kankan, Karifa Kansan Doumbouya, pour Laguinee.info