Il paraît que la rédemption en politique se trouve dans les mosquées et les églises, du moins si l’on en croit le Collectif des Anciens Membres du Gouvernement CNRD. Récemment, des ex-ministres comme Béa Diallo, Guillaume Hawing, Charles Wright, Aly Seydouba Bangoura, Yaya Sow, Moussa Magassouba, Hadja Safiatou Diallo, et Abdourahmane Sikhé Camara ont annoncé leur intention d’organiser des prières pour le chef de l’État, la paix et la cohésion nationale. Une initiative pour le moins surprenante, surtout quand on connaît la tradition des hommes politiques à se rappeler des prières précisément quand les portes du pouvoir se referment.
On pourrait presque croire à une sincère volonté de contribuer à la paix. Mais le timing est quelque peu troublant. Ce collectif, composé de personnalités ayant été, pour certaines, écartées ou critiquées, s’érige soudainement en fervents défenseurs de la prière pour « le bien du pays ». La ferveur religieuse a ses mystères, certes, mais on peine à y voir autre chose qu’une campagne de réhabilitation discrète. Ce groupe semble avoir troqué ses anciennes responsabilités pour de pieuses intentions, mais l’auditeur aguerri se demandera : prient-ils réellement pour la paix ou pour leur propre réintégration dans l’arène politique ?
Il est curieux que cette soudaine vague de dévotion frappe ces anciens membres du gouvernement précisément quand ils se retrouvent hors des feux de la rampe. Tant qu’ils tenaient les rênes du pouvoir, l’idée de prières collectives ne semblait guère les habiter. Aujourd’hui, leurs déclarations enflent d’une sollicitude inhabituelle pour la cohésion nationale. Mais soyons réalistes : les prières pour la paix, très bien ; les prières pour la cohésion nationale, pourquoi pas ; mais les prières pour le chef de l’État ? Voilà une intention qui nous interpelle.
Peut-être est-ce une façon déguisée de rappeler leur loyauté au pouvoir actuel. C’est bien connu, une prière n’a jamais nuit à la carrière politique, surtout si elle est médiatisée. On pourrait croire que ces prières publiques soient un acte de foi, mais elles semblent aussi être un outil de communication bien pensé, destiné à rafraîchir la mémoire des citoyens sur leurs anciens exploits et, pourquoi pas, à émouvoir les dirigeants actuels.
Mais ne soyons pas trop cyniques. Peut-être que ce collectif a vraiment vu la lumière après ses années de service. Peut-être qu’aujourd’hui, ils se sentent véritablement investis de la mission de prier pour la paix et la cohésion nationale. Après tout, la foi a parfois ce pouvoir de réveiller des consciences endormies… Ou alors, c’est une vieille habitude qui ressurgit, celle d’enrober de nobles intentions ce qui n’est qu’une manœuvre de survie politique.
Alors, chers anciens membres du gouvernement, priez si cela vous chante. La paix, la cohésion et le bien-être de la nation sont des causes louables. Mais si, par hasard, derrière ces prières, se cache un brin de nostalgie pour les fauteuils ministériels, alors que vos prières montent haut, très haut, au-dessus de nos têtes. Quant aux citoyens, eux, ils prient aussi. Mais ils prient pour un changement concret et durable, pas pour des promesses en habits religieux.