La mission des Nations Unies en Guinée, en visite pour l’évaluation des besoins électoraux, suscite des attentes et des appels à l’action de la part des acteurs politiques et de la société civile. Alpha Bayo, un influent acteur de la société civile, profite de cette occasion pour mettre en lumière des dossiers sensibles : la situation des prisonniers politiques, des exilés et des disparus.
Le rôle manqué de la CEDEAO dans la transition guinéenne
Dès le début de ses déclarations, Alpha Bayo n’a pas hésité à dénoncer le manque de réactivité de la CEDEAO, l’organisation sous-régionale qui, selon lui, aurait dû jouer un rôle plus déterminant dans l’évaluation des besoins électoraux en Guinée. « Dans les conditions normales, cette fonction est dévolue à la CEDEAO, puisque c’est avec elle que les autorités de la Transition ont signé l’accord dynamique de 2 ans, dont l’échéance arrive le 31 décembre 2024 », a-t-il rappelé.
Il critique sévèrement le rôle de la CEDEAO, soulignant que l’institution a perdu toute crédibilité dans la gestion de la transition guinéenne. Il a ajouté : « Le peuple de Guinée est complètement abandonné par la communauté internationale dans la transition guinéenne, comme si on avait oublié que la Guinée a signé un accord avec la CEDEAO. » Il rappelle que pendant la transition du CNDD, « les institutions onusiennes étaient mobilisées pour le retour à l’ordre constitutionnel ». À cet égard, il compare la situation actuelle à celle de cette période et estime que la Guinée est laissée à elle-même.
Les priorités de la mission des Nations-Unies
Alpha Bayo a exprimé sa satisfaction face à la mission des Nations Unies, mais il a également souligné que la réussite de cette mission dépendra de plusieurs facteurs essentiels. Il a insisté sur le fait que la mission de l’ONU doit se concentrer sur des questions cruciales pour la paix et la justice en Guinée. Selon lui, la mission doit impérativement prendre en compte « la situation de FONIKE MENGUE, de Billo Bah et de tous les disparus ; la situation des prisonniers et des exilés politiques ; l’abandon des méthodes de répression sanglante contre les opposants au glissement du chronogramme de la transition et l’éventuelle candidature du Général Doumbouya. C’est une méthode rétrograde qui n’a jamais été la solution », a-t-il déclaré.
Pour M.Bayo, l’évaluation des besoins électoraux par l’ONU doit intégrer des propositions concrètes pour garantir un avenir démocratique en Guinée. « La réussite de cette mission dépendra de la prise en compte de ces préoccupations fondamentales. L’ONU doit veiller à ce que la situation des prisonniers politiques et des exilés soit une priorité », a-t-il ajouté.
Il a également exhorté la mission à prendre en compte une proposition capitale pour la transition : « Il est essentiel de reconduire l’article 47 de la charte de la transition dans les dispositions transitoires de la nouvelle constitution, afin d’interdire au Président et aux membres du CNRD de faire acte de candidature, ni aux élections nationales, ni aux élections locales, qui marqueront la fin de la Transition », a-t-il affirmé. Selon lui, l’adoption de cette mesure marquerait « le début du commencement » pour la résolution de la crise qui frappe actuellement la Guinée.
Une priorité absolue : la libération des disparus
L’un des points centraux de l’intervention de Bayo concerne la libération des disparus politiques. « La situation des disparus doit être une priorité absolue. FONIKE MENGUE, Billo Bah et tous les disparus doivent être libérés », a-t-il insisté. Il a ajouté que, pour que le travail de l’ONU en Guinée soit véritablement efficace, la mission doit d’abord exiger la libération des personnes disparues. « La priorité doit être donnée à leur libération, car c’est une condition sine qua non pour qu’une mission sur le terrain ait un véritable impact », a-t-il affirmé.
Alpha Bayo a également souligné l’importance de mettre à profit cette mission pour évoquer la situation des personnes « arbitrairement et injustement arrêtées », dont les familles traversent des moments extrêmement difficiles. « Nous, leurs proches, vivons les moments les plus difficiles et périlleux. Les familles des disparus souffrent terriblement et attendent de voir leurs proches revenir chez eux », a-t-il conclu.
Un appel à l’action
La mission des Nations Unies en Guinée est une occasion cruciale pour la communauté internationale d’aborder des questions fondamentales concernant les droits humains et la justice politique en Guinée. Alpha Bayo, tout en saluant l’initiative de l’ONU, a rappelé que la réussite de cette mission dépendra de l’engagement concret pour la libération des prisonniers et des exilés politiques, et de la révision des politiques répressives. Les espoirs placés en cette mission pourraient bien marquer un tournant décisif pour l’avenir de la Guinée.
Ibrahima Alhassane Camara pour Laguinee.info