samedi, novembre 2, 2024
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Guinée : quelle voie pour sortir de l’ornière ? Par Mamadou Laafa Sow

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Alors qu’elle a célébré les 66 ans de son accession à l’indépendance le 2 octobre 2024, la Guinée, pays riche en ressources naturelles, surnommée « scandale géologique » pour l’abondance de ses minéraux, est toujours confrontée à une stagnation politique et économique qui interpelle la conscience collective. Depuis 1958, ce pays francophone d’Afrique de l’Ouest de 245 857 kilomètres carrés a été dirigé par plusieurs régimes civils et militaires qui n’ont pas réussi à relever les défis du développement, de Sékou Touré à Mamadi Doumbouya.

Le pays, qui a déclaré son indépendance après avoir rejeté l’offre de la communauté franco-africaine le 28 septembre 1958, a été dirigé successivement par des régimes normaux et transitoires, souvent issus de coups d’État militaires. Ces changements brutaux ont contribué à une instabilité chronique, freinant l’établissement d’institutions républicaines solides et le respect des principes démocratiques.

Sur le plan économique, malgré ses immenses ressources naturelles, la Guinée n’a pas réussi à transformer ses richesses minières en une véritable prospérité pour sa population. Les progrès réalisés dans les infrastructures, l’éducation et la santé sont limités, laissant de larges pans de la population dans l’extrême pauvreté. Les inégalités sociales se creusent et le chômage touche particulièrement la jeunesse, qui se voit de plus en plus délaissée et sans perspectives.

Politiquement, la situation est encore plus préoccupante. Les institutions républicaines, censées garantir la stabilité et le bon fonctionnement de l’État sont souvent fragilisées par l’ingérence du pouvoir exécutif. Le déséquilibre entre les trois pouvoirs – exécutif, législatif et judiciaire – et la centralisation du pouvoir autour d’une élite dirigeante étouffe la voix du peuple et les initiatives de développement. Cette prédominance du volet politique sur les programmes de développement a empêché la mise en œuvre de réformes efficaces et durables.

Aujourd’hui, la question se pose au sein de l’opinion publique : quel type de régime la Guinée doit-elle adopter pour sortir de l’ornière ?

Le piège des régimes militaires

Les régimes militaires qui ont jalonné l’histoire récente de la Guinée ont souvent été perçus comme des solutions à court terme pour rétablir l’ordre dans des contextes de crise politique ou sociale. Si certains régimes militaires ont pu restaurer une stabilité temporaire, leur tendance à restreindre les libertés, à gouverner par la force, et à limiter les droits démocratiques a souvent aggravé les problèmes sous-jacents. En effet, l’absence de contre-pouvoirs et la centralisation du pouvoir dans les mains d’une junte militaire créent des environnements où les décisions se prennent sans consultation, renforçant ainsi le cycle de la méfiance et des contestations populaires.

Le régime civil, une voie encore inexplorée ?

Dans un certain nombre de mesures, un régime civil démocratique, fondé sur la transparence, la participation citoyenne et le respect des institutions, semble être une voie plus prometteuse pour un développement durable. Toutefois, en Guinée, les régimes civils ont aussi souvent été caractérisés par des divisions politiques, des luttes de pouvoir internes et une mauvaise gouvernance. Le manque de transparence et de concertation entre les dirigeants et la population a affaibli la démocratie guinéenne, rendant la société vulnérable aux coups d’État et à l’instabilité.

Pourtant, la démocratie reste l’option la plus viable à long terme pour sortir la Guinée de l’impasse. Un régime civil fort, où les institutions républicaines fonctionnent de manière indépendante et transparente, peut offrir la stabilité nécessaire pour réformer l’économie, investir dans l’éducation et permettre à la jeunesse et aux femmes de jouer leur rôle moteur dans le développement du pays.

La jeunesse et les femmes : l’espoir d’un renouveau

L’avenir de la Guinée réside dans sa capacité à donner une voix à ses jeunes et à ses femmes. Ce sont eux qui représentent le potentiel de transformation du pays. Cependant, ils sont souvent marginalisés dans le processus de prise de décisions. Le chômage des jeunes et l’exclusion des femmes des sphères décisionnelles sont des freins majeurs au progrès.

Quant aux grands intellectuels du pays, ils sont divisés en deux blocs, selon les options qui les animent. Les uns promeuvent les fausses promesses, les autres se taisent avec leur conviction. Le tout, au grand dam des laborieuses populations.

Pour sortir de l’ornière, la Guinée doit impérativement repenser ses structures politiques et sociales. Un régime civil démocratique, axé sur la participation active de tous les citoyens, pourrait non seulement rétablir la confiance dans les institutions, mais aussi permettre de canaliser les énergies et les talents de la jeunesse et des femmes vers des réformes constructives.

Vers une transformation collective

La Guinée, avec ses ressources naturelles et humaines, a les atouts nécessaires pour sortir de l’ornière et rejoindre le cercle des pays émergents comme la Chine l’a fait pour arriver là où elle est aujourd’hui en termes de développement. Sinon, faisons juste une petite analyse sur le récent sommet qui a eu lieu en Chine. Mais cela ne sera possible que si une véritable transformation politique et sociale s’opère dans notre pays, la Guinée, de façon collective.

En tout cas, jusque-là, ni les régimes militaires, ni les régimes civils traditionnels n’ont apporté les solutions attendues. La preuve en est que le pays est en train de se vider de ses bras valides qui empruntent des voies incertaines vers d’autres horizons, notamment en Europe, aux Etats Unis, au Canada… Le pays doit désormais se tourner vers un modèle de gouvernance inclusif, où les institutions sont solides, où les citoyens sont consultés, et où la jeunesse et les femmes jouent véritablement un rôle central dans le développement national.

L’heure est propice pour chaque Guinéen de prendre conscience de son rôle dans cette transformation, car c’est ensemble, avec un leadership éclairé et une gouvernance transparente, que la Guinée pourra réellement sortir de l’ornière et s’ouvrir à un avenir prospère et stable.

Mamadou Bhoye Laafa Sow, journaliste

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