À Kankan, tout comme dans beaucoup de localités en Guinée, le mariage forcé reste un fléau insidieux, brisant les rêves de nombreuses jeunes filles. Malgré les luttes acharnées menées par des institutions et des organisations pour mettre fin à cette pratique inacceptable, la réalité est que ce phénomène persiste, rongé par des traditions profondément ancrées. L’histoire d’une jeune diplômée, contrainte au mariage contre sa volonté, illustre tragiquement cette lutte silencieuse.
Un destin scellé sans consentement
« Je ne voulais pas de ce mariage ! » Ces mots résonnent avec une douleur poignante dans la voix de cette jeune fille, qui a choisi de rester anonyme pour protéger sa famille. Diplômée et pleine d’ambition, elle se retrouve promise à un homme marié, sans avoir eu son mot à dire. Dans son témoignage, elle se remémore les moments de désespoir où elle a tenté, en vain, de dissuader ses parents.
« L’histoire a commencé il y a environ deux ans. L’homme est venu avec un ami, me disant qu’il voulait m’épouser. J’étais choquée. Je lui ai répondu que le mariage est un rêve pour toute femme, mais que je n’étais pas prête. La ville est grande, il pourrait trouver une autre fille. Mais ils sont partis sans revenir, et mes parents ont accepté les dix noix de cola, comme si ma vie n’avait aucune valeur », raconte-t-elle, la voix tremblante de colère et de tristesse.
Une pression familiale écrasante
La réalité de la pression familiale s’est intensifiée lorsque la jeune fille a découvert que ses parents avaient avancé dans les préparatifs du mariage sans la consulter. « Un jour, ma sœur m’a dit qu’ils avaient envoyé la valise. Je suis tombée de ma chaise. On ne prépare pas la valise d’une femme sans son accord ! J’ai appelé l’homme pour lui dire qu’il perdait son temps. Je ne vais pas dans ce foyer, je ne peux pas ! » La détermination dans ses paroles est palpable, mais la peur l’accompagne.
« Mes parents m’ont même menacée de m’attacher pour me forcer à épouser cet homme. Mais je préfère fuir que de vivre cette vie. Je ne veux pas être une prisonnière », déclare-t-elle avec une force désespérée, faisant écho à une lutte que beaucoup de jeunes filles vivent en silence.
Une pratique pourtant condamnée
Malgré les lois qui interdisent le mariage forcé en Guinée, cette pratique tragique perdure. Trop souvent, des histoires comme celle de cette jeune fille passent sous silence, étouffées par la peur et la honte. L’injustice de sa situation est emblématique d’un système qui, même s’il a des lois en place, laisse encore trop de victimes sans voix.
« Je suis en droit de me battre pour ma liberté, mais je crains aussi de créer des problèmes à mes parents. C’est un dilemme terrible. Comment défendre mes droits sans blesser ceux qui m’ont donné la vie ? » demande-t-elle, les larmes aux yeux.
De Kankan, Karifa Kansan Doumbouya, pour laguinee.info