Rien, pratiquement rien ne semblait marcher dans le bon sens, quand les jeunes gradés de l’armée républicaine, ceux des Forces Spéciales en première ligne, décidaient le 5 septembre 2021 de mettre en gage ce qu’ils ont de plus cher, en l’occurrence leur vie, pour venir au secours de leurs compatriotes martyrisés par plus d’une décennie de tractations politico-politiciennes lugubres sous une atmosphère de désolation inquiétante.
A l’époque, c’était comme si le ciel nous damnait à dessein. A y réfléchir plus en profondeur, on avait l’impression que c’est le souffle des ancêtres qui nous lâchait, en représailles de nos transgressions et profanation de nos valeurs sacrées. En réalité, c’est tout autour de nous qui se fanait dangereusement, inéluctablement, tragiquement.
Je ne parle pas seulement de la pandémie de COVID19 avec son triste tableau de décompte macabre que l’OMS et ses représentations dans tous les pays du monde étaient obligées de mettre à jour chaque matin.
Je ne parle pas non plus uniquement du climat de méfiance généralisée entre les communautés sœurs de notre pays que les politiques avaient exacerbée à volonté dans le seul but de nourrir leur hégémonie personnelle. Mais je parle aussi du désespoir profond qui caractérisait nos populations en ces jours de « soleil pâle succédant des nuits sans étoiles ».
Je voudrais faire également allusion à l’impasse politico-économico-sociale à laquelle faisait face nos administrations et le Président déchu lui-même après avoir forcé son mandat de trop.
C’est dans ce contexte particulièrement délétère que ces jeunes militaires ont pris leur responsabilité de présider aux destinées d’une nation qu’un Sorbonnard en complicité avec plusieurs autres intellectuels du même bord et de bords opposés avait littéralement mis à genoux à coups de décisions irrationnelles et de prises de positions partisanes.
Sans surprise aucune, les entrants qui venaient mettre fin à cet état de fait calamiteux doublé d’un putsch constitutionnel qui avait fait couler sang et sueur, bénéficiaient d’une légitimité d’entrée qui se passait de tout commentaire.
Au-delà des motifs éloquemment présentés par les jeunes militaires, la marée humaine qui a applaudi le renversement du régime défunt suffit pour prouver cette légitimité.
Deux ans et demi se sont écoulés cependant et les hommes commencent à oublier.
On commence tellement à oublier, que l’on ne se souvient même plus du calvaire qui a poussé ces jeunes militaires à se sacrifier pour que revienne un minimum de quiétude, de sérieux et d’espoir.
On oublie tellement vite, qu’on n’a plus la moindre séquelle des tourments que nous avons vécus durant les dix ans de politique politicienne entre manifestations violentes organisées par les uns et les répressions musclées conduites par les autres du camp d’en-face.
On oublie tellement vite, que l’on ne se rappelle même plus des promesses à faire rêver débout que les hommes politiques nous ont faites au cours des années passées sans aucune suite.
Pourtant sur tous les plans, dans tous les domaines et de tout point de vue, le contraste entre le niveau de quiétude sous l’ère CNRD et celui pendant le régime d’Alpha Condé, et peut-être bien avant, est un fossé.
Il y a certes eu récemment quelques agitations qui ont conduit à des incidents, voire à des pertes en vies humaines. Toutefois, sans vouloir justifier quoique ce soit, il est évident que ces incidents n’ont rien de comparable à ceux que nous avons vécus dans ce pays au cours des années avant l’avènement du CNRD.
Seulement les gens oublient vite, et trop vite dans ce pays.
Sinon, s’il est difficile d’évaluer avec objectivité et comparer les ampleurs des remous sociaux et les niveaux de quiétude avant et après l’avènement du 5 septembre, il est tout de même facile de comparer les intensités, je dirais l’efficacité des travaux de réalisation des infrastructures sociales de base à travers le pays avant et après le changement.
En effet, si l’on s’en tient à la célérité des travaux sur le terrain et au sérieux observé dans la réalisation des projets d’investissements publics, l’écart est abyssal.
Le nombre de projets de construction d’écoles commencés et achevés en ces deux années et demie, le nombre de projets de construction de routes et d’autres ouvrages initiés et finalisés pendant cette transition, comparé aux performances des administrations du régime défunt, il ne devrait pas y avoir cliché.
Même certains projets de grande envergure initiés pendant les dix ans du régime défunt qui agonisaient pour manque de sérieux n’ont connu le sérieux dans leur mise en œuvre que grâce au sérieux requis par le CNRD.
Comme exemple de ces projets (nouveaux et anciens) on peut citer les échangeurs de Kagbélé, de Coyah et de Bambeto en finition; les écoles du type Barry Diawadou à travers le pays, la mosquée Fayçal dont la réhabilitation avait duré plus de 10 ans, l’hôpital Donka dont les travaux étaient arrêtés sans raison, la nouvelle cité ministérielle de Donka et plein d’autres projets de ce genre à travers le 246 000 Km2 de notre cher pays.
Vraiment, on oublie trop vite dans ce pays.
On oublie tellement vite que l’on ne se souvient plus des délestages d’électricité sous le régime défunt. Pourtant, ce qu’on ne dit pas assez, que certains ne savent peut-être pas assez, que ceux qui savent taisent certainement trop, c’est que les récents délestages d’électricité qui font objet de tant de commentaires sont en réalité la preuve tangible de la sérénité et la vision longtermiste du Président Général Mamadi Doumbouya.
En effet, contrairement à ce qui a été vendu aux populations par les autorités du régime défunt, une grande partie de l’électricité qui était distribuée en période d’étiage toutes ces années avant le 5 septembre était produite par le bateau thermique turc à des coûts insupportables. L’Etat continuait cependant à supporter ces coûts quitte à s’endetter souvent à des conditions désavantageuses et avec des périodes dites de grâce différant la charge de la dette à nos enfants et petits-enfants. Et toute l’élite était d’accord que nous, génération d’aujourd’hui, consommions de l’électricité et laisser la facture pour les générations futures. C’est ce que le CNRD refuse.
La conviction du CNRD est que si nous allons consommer des biens et des services, il faut que nous soyons sûrs que nous pouvons en assurer la facture.
A la limite, nous devons créer les conditions pour laisser des impacts positifs sur les infrastructures, qui aideront les générations futures à s’en sortir. C’est méchant ça ? En tout cas c’est ce qui est en cours de réalisation avec les projets d’interconnexions sous-régionales, qui, quoique initiés avant le CNRD, étaient tout de même abandonnés pour faute de moyen.
Les montants colossaux qui devraient être mis dans le bateau thermique pour nos besoins qu’il convient somme toute de respecter, ont été utilisés en partie pour indemniser les personnes affectées par le projet d’interconnexion Guinée-Mali, nous étions témoins et nous devrions être fier des décideurs qui ont pris cette décision.
Nous devrions être fiers de leurs décisions en ce sens que les infrastructures d’interconnexion qui seront réalisées seront utiles aussi bien pour nous que pour nos enfants.
Les hommes oublient vite. Ils oublient trop vite. Il oublient tellement vite qu’il est souvent nécessaire de faire des rappels, pour que ceux qui sont de bonne foi se souviennent des contextes qui ont présidé à des situations complexes et que les autres continuent dans leur gymnastique de prédilection qui consiste à tout dénigrer sans raison, sans preuve et sans limite.
Les hommes oublient trop vite dans ce pays.
Oumar Barry, Ingenieur Civil, Economiste du Développement