Devant les journalistes ce vendredi 22 mars 2024, le Directeur du bureau Afrique de Reporters sans frontières (RSF) et la Chargée de plaidoyer Afrique Subsaharienne, ont animé une conférence de presse au terme d’une mission de travail à Conakry, rapporte une journaliste de Laguinee.info. Ces deux grosses figures de cette organisation internationale, ont exprimé leur solidarité à leurs confrères avant de condamner les répressions répétées dont ils sont victimes sous le régime militaire.
En Guinée, les grands médias audiovisuels privés sont brouillés depuis plus de trois mois. Certains sont de nos jours obligés de mettre leurs employés au chômage technique, pour des raisons économiques.
Face à cette situation, le responsable du bureau Afrique subsaharienne de Reporters Sans Frontières à Dakar, s’est indigné : « Je suis particulièrement triste parce que, je suis actuellement dans un pays, le seul pays au monde où des médias performants, des médias qui sont aux services publics, mais aux services publics utiles aux populations. Des médias sont brouillés. C’est où le service public de l’information ne sont plus accessibles grâce à une volonté pas encore assumé publiquement, mais dont on connaît publiquement la direction. Je voulais dire que cela est anachronique dans le monde actuel. La possibilité de priver à des médias de fonctionner est anachronique. Il faudrait que de plus en plus dans nos pays, y compris la Guinée que les dirigeants puissent accepter de voir de son entourage la contradiction des voix plurielles. C’est ça le pluralisme des médias. Sur l’échelle mondiale c’est la même mesure, et c’est important pour ce pays-là. Ça je le dis de manière solennelle que le pluralisme puisse être assumée, puisse être reconnu sur le plan politique. L’impression que nous avons, est que nous sommes en face des questions techniques, qui empêchent à des médias, à des pourvoyeurs d’emplois. 500 emplois, c’est trop... », a-t-il déploré.
Après quatre jours passés en Guinée, ces émissaires de RSF affirment avoir rencontré les médias impactés pour toucher du doigt la réalité.
« Nous nous sommes rendus compte effectivement que l’environnement économique est extrêmement difficile. Mais au-delà de cela, il faut de plus en plus prôner un environnement économique utile, digne d’intérêt pour les populations. Et cela, les promoteurs de médias jouent leur fraction en payant les taxes. Mais la promotion de l’environnement économique appartient aux autorités politiques. Et ça c’est une solution que les autorités politiques doivent mettre en œuvre. Autrement dit, cela va s’exacerber davantage avec la mise en chômage technique que nous avons vu, cela peut s’exacerber davantage avec la possibilité de pousser des investisseurs et des médias qui n’ont jusque-là fait aucune faute professionnelle à fermer. Et c’est grave pour un pays. Nous avons rencontré donc les médias impactés par ces entraves, nous leur réitérons notre soutien, le soutien des Reporters Sans Frontières, dans l’ensemble de ses sections dans le monde, de ses bureaux », a-t-il déclaré.
Il a réitéré son soutien aux médias victimes de musèlement : « Nous sommes plus que jamais avec vous, dans ces moments extrêmement difficiles. S’il y’a des stratégies d’aller vers le droit, nous sommes prêts à travailler avec les organisations pour cela. Mais ce qui nous semble plus important, c’est d’aller de manière très urgente vers des solutions. Cela, nous l’avons dit directement à monsieur le premier ministre, et nous avons vu sa volonté d’aller vers des solutions très rapides. Nous l’encourageons effectivement dans ce sens. Je profite également pour lancer un appel à monsieur le président du CNRD. Il est important que la Guinée retrouve la vitalité démocratique, de la liberté de la presse. Il ne faut pas tuer le journalisme en Guinée, il doit continuer à exister…Il faut dire stop. Et il est important que tous les médias touchés puissent reprendre leurs activités, afin d’assurer l’accès des citoyens à une information plurielle », a ajoute Sadibou MARONG.
La chargée de plaidoyer pour l’Afrique du Sud Sahara à RSF, estime que depuis le mois de novembre 2023, les médias guinéens connaissent un contexte très difficile, alors que les autorités au pouvoir s’étaient engagées à promouvoir la liberté de la presse.
« Au-delà, nous l’avons également vu avec les coupure de l’internet pendant trois (3) mois, quelque chose qui n’était pas arrivé en Guinée, le blocage des sites d’informations, le brouillage des ondes de radios comme Fim FM, le retrait de certaines chaînes de télévision telles que Djoma TV, Espace TV, Évasion TV pour des questions disons de sécurité nationale. Et tout ça prive les citoyens guinéens à leur droit à une information plurielle qu’ils n’ont pas sur le territoire. A cela s’ajoute la détention arbitraire du Secrétaire du SPPG, Sékou Jamal Pendessa. Il faut également rappeler que ces médias et ces journalistes qui sont concernés par ces restrictions sont économiquement très affaiblis. Et, cela réduit considérablement leurs activités puisqu’ils sont mis en chômage technique. Ce sont toutes ces raisons qui expliquent notre venue ici à Conakry. C’est pour également rencontrer aussi des journalistes concernés, les Directeurs généraux des médias, les rédacteurs et chef, les directeurs et directrices de publication pour avoir une idée sur les réalités qu’ils ont fait face depuis ces mois et qui portent un coup à la liberté de la presse. On a également eu l’occasion de rencontrer le nouveau Premier Ministre, ensuite le nouveau Ministre de l’Information et de la Communication », a indiqué Jeanne LAGARDE.
Le PM Bah Oury a indiqué son attention d’apaisement et de dialogue entre les médias et les autorités, a-t-elle rappelé.
« On ne peut que l’encourager dans ce sens, en faisant du déblocage des médias concernés une priorité qui doit s’opérer dans les prochaines semaines au maximum. Car, sans liberté des médias, le pluralisme et le droit à l’information dont tous les citoyens bénéficient ne sont pas respectés. Les journalistes détiennent un rôle primordial dans l’information et dans la construction du débat public. Cette position peut les faire des cibles pour des personnes désireuse de contrôler l’information, la sécurité, la protection et le libre exercice des journalistes dans le respect de l’éthique et la responsabilité bien-sûre, qui sont des valeurs indispensables pour que le droit soit respecté. Nous avons donc l’obligation de défendre les journalistes et la liberté d’expression face à tous les dangers qui les menacent, ce qui fait la pertinence de cette conférence », signale cette journaliste.
Sirani Diabaté, pour Laguinee.info