Mon colonel,
C’est pour la deuxième fois que je m’adresse à vous. Même si la première n’avait suscité aucune réaction de votre part, en tant que citoyen guinéen, soucieux de la préservation de la paix et de la quiétude sociale, je ne cesserai de m’adresser à vous que lorsque vous aurez joint l’acte à la parole du 5 septembre 2021.
Mon colonel,
Connaissant parfaitement les maux dont souffraient les Guinéens, vous avez pris un engagement solennel devant Dieu et devant le peuple de Guinée de mettre fin à ces maux. Deux ans après, je vous prie de jeter un coup d’œil sur ce discours pour voir si vos actes n’ont pas trahi votre parole. Notamment en ce qui concerne le caractère sacré de la vie humaine. Parce que le deuxième anniversaire de votre accession au pouvoir a célébrépar certains dans la joie et d’autres dans les pleurs. Contrairement à l’engagement que vous avez pris il y a deux ans, la date du 5 septembre a été souillée. Le sang guinéen a été versé.
Mon colonel,
J’imagine la peine qui doit être la vôtre, lorsque vous vous retrouvez en famille et que vous regardez vos enfants sachant que d’autres guinéens pleurent les leurs fauchés par les forces de défense et de sécurité dont vous êtes le chef. J’imagine la douleur qui doit être la vôtre lorsque vous vous rendez compteque le même système qui a conduit vos deux prédécesseurs respectivement en prison et en exil vous entraîne peu à peu sur une piste glissante.
Mon colonel,
Malgré le désarroi qui doit être le vôtre, il est encore temps de rectifier le tir. Il existe une possibilité de sortir par la grande porte. A condition toutefois que vous preniez votre courage de deux mains. Pour écouter. Non pas ceux qui vous disent que vous êtes le meilleur des Guinéens. Que c’est vous ou le chaos. Et qu’il faudrait écraser tous ceux qui se dressent sur votre chemin. Non, mon colonel. Ceux-là sont plus dangereux pour vous que ceux qu’ils prétendent combattre à votre nom.
Mon colonel,
Pour sauver les meubles et votre honneur, vous devez désormais écouter ceux-là qui ne disent pas forcément ce qui vous plaît. C’est là que se trouve votre salut. Et celui de la Guinée. J’ai dit et répété hier au capitane Moussa Dadis Camara et au professeur Alpha Condé ce que je suis en train de vous dire aujourd’hui. Je leur avais dit que leurs thuriféraires d’hier devaient être leurs pourfendeurs d’aujourd’hui. Malheureusement, l’histoire m’a donné raison. Parce que beaucoup d’inconditionnels de votre prédécesseur sont devenus les vôtres.
Mon colonel,
Je ne terminerai cette lettre sans vous faire quelques recommandations. En espérant que, non seulement ce message vous parviendra mais aussi vous en tiendrez compte. Je vous demande :
Premièrement : de vous impliquer personnellement pour la résolution du conflit entre le ministre de la justice et les magistrats. La paralysie de l’appareil judiciaire est préjudiciableà l’Etat et aux justiciables. Elle ternit gravement l’image de notre pays.
Deuxièmement : de veiller à ce que le procès sur la tragédie du 28 septembre 2009 connaisse enfin son épilogue.
Troisièmement : de veiller à la tenue d’un procès juste et équitable pour les anciens dignitaires accusés de détournementde derniers publics par la CRIEF.
Quatrièmement : de publier les résultats de l’évaluation des membres du gouvernement. Et de récompenser chacun selon ce qu’il aura obtenu comme résultat.
Cinquièmement : de rassurer les acteurs politiques et sociaux par la neutralité et l’impartiale du CNRD afin que les exilés rentrent au pays et que, tous, la main dans la main, vous œuvriezà la réussite de la transition. C’est la seule voie de salut pour vous. Et pour nous tous.
Habib Yembering Diallo
Journaliste-écrivain.
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