A Boké, les femmes de Thouaye, un village de la commune rurale de Tanéné situé à une dizaine de kilomètres du chef-lieu de la préfecture, se livrent à l’extraction de gravier dans les différentes carrières de la localité. Cette activité habituellement réservée aux hommes est de plus en plus pratiquée par ces femmes rurales à la quête du quotidien. Un désastre environnemental car, il n’y a aucun contrôle de l’État dans cette zone économique spéciale où les citoyens bénéficient des retombées de l’exploitation minière, rapporte le correspondant de Laguinee.info basé à Boké.
Le site d’exploitation artisanale de gravier à Thouraye, s’étend sur un vaste domaine de plusieurs hectares où de nombreuses femmes et d’enfants travaillent à plein temps pour extraire cette ressource naturelle. Chaque jour dès les premières heures de la matinée, ces mères de famille avec des pelles, des pioches et des marteaux prennent d’assaut la carrière. Aïssatou Mané une vieille d’une soixantaine d’années s’emploie à faire ce travail très pénible.
« Mes enfants et moi pratiquons cette activité depuis plusieurs années maintenant. Quand nous venons le matin c’est pour rester jusqu’à 17 heures et parfois nous n’avons rien à manger », explique cette vieille femme.
Ces femmes travaillent à mains nues sans aucune mesure de protection. Des conditions de travail extrêmement difficiles mais elles n’ont pas d’autres choix, car, disent-elles, c’est le seul moyen pour gagner leur quotidien. Un travail pénible autrefois réservé aux hommes qui demande courage, résistance et force physique.
Tous les jours après les travaux ménagers, Maladho Camara et ses enfants viennent ici pour faire le même travail pour survivre.
« Le matin, si tu as 500 francs guinéens, tu achètes la bouillie pour ton enfant pour lui permettre de résister à la faim jusqu’au soir. Pratiquement, nous vivons au jour le jour. Nous ne gagnons pas grand-chose mais Dieu merci ! Parce que quand ton enfant tombe malade avec tes économies tu peux au moins faire quelque chose. Nos maris ne travaillent pas », explique cette dame.
Poursuivant sa narration, Maladho Camara fait savoir que la chaîne de production est constituée en groupement de 60 femmes qui travaillent en plusieurs équipes de 8 personnes chacune. Et pour obtenir un chargement, il faut creuser et tamiser pendant près d’une semaine. « On évolue dans un groupement de 60 femmes dont huit par équipe. Pour obtenir un chargement il nous faut au moins 7 jours d’activité. » dit-telle.
Une triste réalité car, à proximité de ce site de carrière se trouvent les installations de l’une des plus importantes compagnies minières à Boké. Malheureusement ces populations impactées par l’exploitation minière sont abandonnées à elles-mêmes. Kadiatou Koumbassa déplore cet état de fait.
« Ils n’ont pas employé nos enfants dans les entreprises minières de la place. Et pourtant nous sommes impactés par leur projet, parce que nous ne pouvons plus travailler la terre par leur faute. Nous demandons leur aide afin que nos enfants soient employés dans lesdites sociétés », plaide-t-elle.
Les responsables de la commune rurale de Tanènè sont au courant de cette exploitation sauvage du sous-sol. Ils disent comprendre la souffrance de ces femmes. « Effectivement, nous sommes au courant que ces femmes sont en train d’extraire le gravier dans ces sites de manière illégale. Mais, nous fermons nos yeux car, elles n’ont d’autres activités, la situation est compliquée », laisse entendre Amadou Kaba, maire par intérim de la commune rurale de Tanéné.
Dans ce chantier, combien coûte un tas de gravier ? Difficile de connaître exactement le prix du chargement. L’important pour ces femmes, c’est de trouver de quoi nourrir les enfants. Elles demandent l’assistance de l’État afin de les aider à combattre la pauvreté dans leur localité. Une pauvreté qui les pousse visiblement à exercer des travaux pénibles afin de nourrir leurs familles respectives.