En Afghanistan, les évacuations de ressortissants étrangers se poursuivent et de nombreux afghans cherchent à quitter le pays. L’Otan a appelé les talibans à permettre les évacuations de toutes les personnes qui veulent quitter le pays. En parallèle, des rassemblements ont eu lieu dans plusieurs villes du pays pour résister face aux talibans. Mais l’inquiétude monte rapidement dans la population.
Alors que l’Otan a appelé les talibans à permettre les évacuations des personnes qui veulent quitter le pays, le président américain Joe Biden s’adresse ce samedi 21 août à sa population. C’est la deuxième fois en quelques jours qu’il s’exprime au sujet de ces évacuations et des opérations qui vont avec.
Parmi ceux qui cherchent à fuir l’Afghanistan, Gohar, un jeune homme travaillant dans une radio locale de la province de Kunar, à l’est du pays. Il ne sort plus de chez lui depuis quelques jours, et fait partie des personnes les plus à risque en ce moment.
« Je fais de la radio, et dans mes émissions, je demande aux gens de travailler en faveur de la paix, de ne pas accepter les ennemis de la paix. Je dis que les talibans ne sont pas bons pour l’Afghanistan. Je sais qu’il y a des chaînes câblées qui diffusent dans certaines provinces, mais dans ces endroits-là, c’est plus dangereux pour nous. Parce que tout le monde me connaît dans ma province, les talibans connaissent mon nom, que je travaille pour cette radio », raconte Gohar.
Le jeune homme explique que sa station radio n’émet plus rien, car il n’y a plus personne, les gens de l’équipe sont partis. À cela s’ajoute le fait que les talibans interdisent désormais de diffuser de la musique.
« Si je ne diffuse plus de musique qui va écouter ma radio ? Je connais les gens de ma province, ils n’ont plus de musique, ils peuvent seulement entendre des religieux parler entre eux, et leur dire d’aller combattre ou tuer. Ils veulent juste qu’on diffuse ces choses-là, mais pas de musique. Et si vous n’en diffusez pas, les gens ne vont pas écouter votre radio. Et je n’aurais plus de recettes publicitaires. Les entreprises, les magasins, qui va financer la radio ? Je n’ai plus aucun revenu en ce moment. »
Les craintes de la minorité chiite hazara
Parmi ceux qui craignent pour leur vie depuis l’arrivée des talibans, la minorité chiite hazara. La communauté, déjà persécutée depuis de nombreuses années, a déjà connu des actes hostiles à son encontre. Neufs hommes sont morts dans la province de Ghazni depuis que l’organisation islamiste a pris le contrôle de la région et une statue d’un des leaders politiques hazara a été détruite à Bamyan dans le centre du pays.
Ces agissements renforcent l’inquiétude de la communauté hazara. C’est ce qu’explique un jeune hazara, qui se trouve à Kaboul: « J’ai personnellement très peur, car j’ai été employé dans des ministères durant six ans et j’ai travaillé pour une ONG pendant trois ans. Il y a des preuves que les talibans essaient d’identifier les employés et collaborateurs du gouvernement afghan. »
Le jeune homme explique que son père était un employé du ministère de l’Éducation afghan et a été licencié par les talibans. Il a donc perdu son droit à continuer d’exercer son métier et a été agressé physiquement par les talibans. Par conséquent, il reste chez lui a extrêmement peur de sortir.
« Malheureusement, on habite à Kaboul dans un quartier où très peu de hazaras vivent. En plus, je suis un chiite, ce qui me rend plus vulnérable, car les talibans perçoivent les chiites de manière générale et encore plus les hazaras comme des infidèles. Je vois tous mes espoirs, mes efforts et mon éducation s’envoler en fumée. Le sentiment de déception, d’impuissance m’étouffe, j’ai tellement de choses à offrir à ce monde. J’ai envie d’avoir l’opportunité de me sentir de nouveau un être humain. »
Une résistance de la population est-elle possible ?
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Quelle pourrait être la résistance de la population afghane face aux talibans ? Des rassemblements se sont produits à Kaboul, Assadabad, et à Jalalabad ces derniers jours. Plusieurs personnes ont été tuées dans certains rassemblements, après que les talibans ont ouvert le feu.
« La situation à Kunar est critique, tout le monde vit dans la peur et ignore ce qui va se passer dans le futur, raconte Isanullah qui vit dans cette province à l’est du pays. Toute la ville est militarisée, les gens ont manifesté le jour de l’indépendance afghane, les gens voulaient brandir le drapeau national, le drapeau afghan, mais les talibans le leur ont interdit. La réaction des talibans a été de tirer sur les gens. »
Cet habitant de Kunar explique que les habitants ont peur, qu’ils sont à la fois perdus et déçus en ce qui concerne leur avenir: « Personne ne sait ce qui va se passer demain ni dans le futur. »
Avec RFI