Au nombre de 32, ces Eurodéputés ont, à travers une lettre conjointe adressée au Haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, exprimé leurs préoccupations quant aux cas de violations des droits humains en Guinée, en marge des élections organisées en 2020 et des jours qui ont suivi.
Dans cette lettre en date du 8 avril 2021 et dont Laguinee.info détient copie, ces députés du parlement européen ont évoqué une incompréhension sur une éventuelle sanction qui devrait être infligée sur les responsables de ces cas de violations des droits humains en Guinée.
Laguinee.info vous propose ci-dessous cette lettre conjointe sut la situation des droits de l’homme en Guinée.
À l’attention de Josep Borrel, haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
Bruxelles, le 8 avril 2021
Cher Haut Représentant Borrel,
Le 22 mars 2020, la Guinée a connu l’une des élections les plus contestées, les plus violentes et les moins démocratiques de son histoire. Le double scrutin législatif et référendaire s’est déroulé avec une très forte implication des forces militaires et paramilitaires, dans un contexte de vives tensions politiques et de crise sanitaire.
Aucun argument de légalité, de légitimité, d’opportunité, de moralité – pas même ceux inhérents à la santé publique – ne pouvait plier le président guinéen dans sa détermination à organiser son référendum constitutionnel afin de s’octroyer un troisième mandat illégal.
Et pourtant, la bonne volonté ne manquait pas pour l’en dissuader. Malheureusement, M. Alpha Condé est resté sourd à tous les appels au dialogue lancés, de l’intérieur, par l’Union du clergé guinéen (UCG), le Conseil interconfessionnel, les coordinations régionales, et, de l’extérieur, par la CEDEAO, UA, OIF, UE, ONU, France, États-Unis et Royaume-Uni.
Le double référendum et scrutin législatif voulu par M. Alpha Condé a été organisé, en violation de la Constitution et des lois électorales, avec un dossier sur mesure, dans un contexte de violences sans précédent qui ont entraîné la mort de 99 personnes, dont une trentaine d’enterrées la nuit en forêt dans des fosses communes à Nzérékoré, des centaines de blessés, des milliers d’arrestations et des destructions massives de biens.
C’est pratiquement dans les mêmes conditions de violences et de violations du code électoral que l’élection présidentielle du 18 octobre 2020 a été organisée. Bien que M. Alpha Condé ait perdu cette élection, il sera proclamé vainqueur par la CENI et la Cour constitutionnelle totalement attachée à sa cause.
Aujourd’hui, la situation interne est toujours caractérisée par un effondrement de la démocratie et des violations massives des droits de l’homme.
Depuis la publication des résultats, une répression sanglante a entraîné la mort de 51 personnes, une vague d’arrestations dans le pays et au moins 400 militants de l’opposition et membres de la société civile sont maintenant détenus dans des conditions déplorables, d’autant plus pendant la période Covid-19. Mamadou Oury Barry, Roger Bamba, Mamadou Lamarana Diallo et Thierno Ibrahima Sow ont tous perdu la vie au centre de détention provisoire de Coronthie faute de soins reçus. Tous avaient été arbitrairement arrêtés.
Il convient de rappeler que les auteurs présumés du massacre du 28 septembre 2009, identifiés par la Commission internationale d’enquête mise en place par les Nations Unies, occupent toujours des postes élevés dans l’administration civile et militaire et participent activement à la répression des manifestations pacifiques par l’opposition. Depuis l’arrivée au pouvoir de M. Alpha Condé en 2010, nous avons enregistré la perte de 250 personnes, souvent tuées à bout portant par des agents des forces de défense et de sécurité, des centaines de blessures par balle et le président guinéen n’a jamais accepté qu’une enquête soit menées pour identifier et punir les auteurs de ces crimes, conformément à la loi.
Cette impunité, accordée aux auteurs des crimes passés et récents de M. Alpha Condé, a été régulièrement dénoncée par des organisations de défense des droits humains telles qu’Amnesty International, HRW et la FIDH. Aujourd’hui encore, des personnalités directement ou indirectement responsables de graves violations des droits de l’homme continuent d’occuper des postes de responsabilité dans l’administration civile et militaire. Très souvent, ces personnalités qui détiennent des biens immobiliers et des comptes bancaires en Europe y font régulièrement des déplacements.
Comment l’UE entend-elle mettre en œuvre son nouvel instrument de sanction pour sanctionner ces personnalités responsables de graves violations des droits de l’homme en Guinée? Pour plus de commodité, une liste de personnalités qui ont fait preuve de zèle pour réprimer l’opposition et violer les droits de l’homme est jointe à la copie de ce courriel.
En outre, compte tenu de la gravité de la situation, il est également important de se poser des questions sur l’aide européenne aux pays où il y a un réel manque de démocratie. Comment l’UE s’assure-t-elle que ces fonds ne sont pas acheminés vers les institutions répressives qui ne satisfont pas aux normes minimales requises?
Merci,
Meilleures salutations,
Maria Arena
Stelios Kouloglou Javier Nart
Köster Dietmar Pedicini Piernicola Sylvie Guillaume Norbert Neuser
Erik Marquardt Isabel Santos
Hannes Heide Aurore Lalucq Assita Kanko
Ernest Urtasun Caroline Roose Michèle Rivasi Raphael Glucksmann Alfonsi François Biteau Benoit Careme Damien
Cormand David
Delli Karima Delbos-Corfield Gwendoline Gruffat Claude
Jadot Yannick
Satouri Mounir
Yenbou Salima
Toussaint Marie
Udo Bullmann
Jordi Solé
Jan-Christoph Oetjen Nicolae Ștefănuță
Ivan Štefanec